N°1 / Numérique, Humanités et Sciences du langage

Humanités Numériques, Telecare et Interaction, lors de la pandémie : relations disciplinaires, adaptations méthodologiques, nouvelles analyses

Bruno Bonu, François Giraud

Résumé

This article will deploy the perspective of Digital Humanities in their qualitative and experiential version. They imply interdisciplinarity realized here by a co-authorship and the fruitful association between emergency medicine, the "Digital Humanities" and the study of the uses of technologies. More specifically, we will examine, from Conversation Analysis (CA) and Interactional Linguistics (IL), a medical interaction supported by technologies (telephone), recorded at the very beginning of the Covid Sars-19 health crisis. The health "news" challenge us as citizens and potential patients, but also as researchers, in the sense that the exceptional situation puts our methodologies, notions and analyses to the test. In fact, the bio-social crisis can be examined by means of iconographic representations. It modifies the infrastructure of the meetings between individuals, the spaces of mobilities and the forms of the interaction in presence as at distance. The analysis of an episode taken from the recordings of calls to the SAMU of Saint Etienne highlights the adaptations of the organization of the interaction in the modifications of the functioning of the SAMU, during the very first pandemic wave in March 2020.

Cet article va déployer la perspective des Humanités Numériques dans leur version qualitative et expérientielle. Elles impliquent l’interdisciplinarité réalisée ici par une co-écriture et l’association féconde entre la médecine d’urgence, les « Sciences humaines numériques » et l’étude des usages des technologies. Nous examinerons plus spécifiquement, à partir de l’Analyse de Conversation (AC) et de la Linguistique Interactionnelle (LI), une interaction médicale supportée par les technologies (téléphone), enregistrée au tout début de la crise sanitaire du Covid Sars-19. « L’actualité » sanitaire nous interpelle en tant que citoyens et patients potentiels, mais aussi comme chercheurs, dans le sens où la situation exceptionnelle met à l’épreuve nos méthodologies, notions et analyses. En fait, la crise bio-sociale peut être examinée au moyen des représentations iconographiques. Elle modifie l’infrastructure des rencontres entre individus, les espaces de mobilités et les formes de l’interaction en présence comme à distance. L’analyse d’un épisode tiré d’enregistrements d’appels au SAMU de Saint Étienne met en évidence les adaptations de l’organisation de l’interaction dans les modifications du fonctionnement du SAMU, lors de la toute première vague pandémique en mars 2020.

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  1. Introduction

 

Les conceptions des Humanités Numériques (HN), présentées dans ce numéro, illustrent des cartographies de la recherche inédites (Arènes et alii, 2019) développées au sein de l’Unité de Recherche LHUMAIN. Dans cette entreprise collaborative d’élaboration de perspectives par les membres de l’équipe (différentes parfois, mais toujours complémentaires), des caractéristiques sont mises en relation avec des terrains de recherche. Ils se centrent majoritairement sur le langage en situation dans les mutations en cours dans des activités humaines qui se déroulent dans des environnements technologisés complexes.

 

Cet article veut mettre en évidence le rôle joué dans cet écosystème des HN qui se dessine dans cette revue, par l’étude de différentes formes de Telecare. Nous examinerons plus spécifiquement, à partir de l’Analyse de Conversation (AC) et de la Linguistique Interactionnelle (LI)[1], une interaction médicale supportée par les technologies (téléphone), enregistrée en temps pandémique. « L’actualité » sanitaire nous interpelle en tant que chercheurs dans le sens où la situation exceptionnelle met à l’épreuve aussi nos méthodologies, notions et analyses et pas seulement nos existences et nos vies sociales : « Le Covid-19 constitue une crise bio-sociale en ce sens qu'il n'affecte pas seulement notre santé mais aussi les fondements de notre socialité et les fondements même de l’éthologie de l’interaction » (Mondada et alii 2020).

 

Après avoir mis en perspective notre conception des HN avec les définitions de Telecare qui animent nos recherches en Télémédecine (Section 2), nous présenterons le corpus spécifique et notre méthodologie (Section 3). L’analyse d’un épisode tiré de ces enregistrements d’appels au SAMU de Saint Étienne lors de la toute première vague pandémique (Sections 5 et 6) sera encadrée par des considérations sur les adaptations de la méthodologie de la recherche à l’époque pandémique (Section 4). Des conclusions en guise de perspectives vont clore le texte (7).

 

  1. HN et Telecare en période pandémique

L’analyse de ces transformations demande la mobilisation d’un ensemble de disciplines, dans l’esprit des Humanités Numériques (HN) expérientielles et qualitatives. Ce terme désigne une transdiscipline, porteuse de méthodes, de dispositifs et de perspectives heuristiques liées au numérique, dans le domaine des Sciences Humaines et Sociales (SHS). Les mutations actuellement en cours dans le monde de la santé, la résurgence récente du mouvement (finalement relativement ancien)[2] des HN, se conjuguent avec la crise sanitaire. Ces transformations et ces actualités demandent des démarches analytiques basées sur des connaissances (inter)professionnelles, s’adaptant aux corpus recueillis dans des activités spécialisées, de manière interdisciplinaire au moyen d'ajustements méthodologiques. De plus, les activités spécifiques en médecine (notamment les interactions) sont affectées par les bouleversements à l’œuvre lors de la pandémie, comme dans toutes les formes des rencontres entre individus et dans tous les espaces sociaux, aussi bien ordinaires, privés, publics, institutionnels, fermés, qu’ouverts, statiques ou encore, liés aux déplacements. Cet article analyse l’interaction, soutenue par les technologies dans le domaine médical de l’urgence dont le déroulement est largement affecté par l’alerte épidémiologique du Covid-19. Ces échanges se fondent aussi et peut-être principalement sur cet arrière-plan exceptionnel pratique et épistémologique qui affecte toutes les activités humaines comme les ouvertures des interactions (Mondada 2000 et alii).

 

Les effets de la crise sanitaire arrivent à un moment de transformation technologique profonde de plusieurs domaine de la médecine, puisqu’ on a assisté dès les débuts de ce siècle nouveau, à l’essor des offres des Soins à Distance : « La littérature elle-même se subdivise en fonction de la spécialité clinique, de sorte qu’il existe un ensemble de travaux émergents décrivant et défendant la télédermatologie, la téléradiologie, ou la télépsychiatrie, ces techniques devenant la propriété de groupes professionnels spécifiques » (May, Gask et al., 2001, p. 1893) » (Mathieu-Fritz et Gaglio 2018 : 35) [3].  Mais l’histoire de la Télémédecine remonte loin. Peu de temps après que Bell a inventé le téléphone, breveté en 1876, l’idée d’utiliser ce canal de communication pour échanger avec les praticiens a émergé dans les publications médicales. Mais il faudra attendre les années ‘50 pour que la télémédecine fasse réellement ses premiers pas, par l’usage de la téléphonie pour transmettre des images de radiologie et du média radiophonique[4].

 

 

Figure 1 :  The Radio Doctor

 

L’orientation interdisciplinaire, interprofessionnelle et internationale des HN va de pair avec les objets d’études sur l’interaction dans le Telecare. En fait, parce que l’événement sanitaire global créé par la diffusion du Covid-19 a produit des effets locaux violents, destructeurs et persistants[5], il mobilise des formes d’organisation clinique et technologique qui cherchent à s’adapter à cette situation exceptionnelle. Elle oblige aussi les intervenants dans la chaîne de soins, à modifier les protocoles de prise en charge ou thérapeutiques en vigueur et aux ingénieurs, concepteurs de la base technologique, à transformer les dispositifs numériques déjà existants, mais d’ordinaire employés différemment, peu ou pas du tout.

 

Nos recherches, même si dans ce cas nous présentons principalement une interaction entre un Médecin Regulateur (MR) et une Requérante qui s’avérera être la Patiente (RP), ne se limitent pas à l’échange médecin - patient et à la Télémédecine, puisqu’elle adopte la perspective du Telecare élaborée par la Science Technology Studies (STS, Gaglio et Mathieu Fritz 2018). Si la recherche prend comme pivot l’échange avec les médecins, d’autres interactions qui jouent un rôle déterminant dans les soins sont aussi prises en compte, ici les relations familiales de l’appelante. L’acte médical et sanitaire, doit être saisi comme un acte social impliquant à la fois des agents relevant de corps de métiers sanitaires différents (médecins, infirmiers, paramédicaux, etc.), mais aussi des acteurs exerçant d’autres professions : médiateurs, volontaires, proches et voisins des patients, etc. C’est le premier sens de l’attention portée aux personnes (care) lors des interactions dans l’écosystème de la santé.

 

L’analyse de la médiation est étendue aussi aux moyens technologiques de support des pratiques médicales à distance. Elle n’inclut pas seulement la Téléconsultation avec des dispositifs de vidéocommunication, mais aussi le téléphone, spécifiquement dans le projet présenté ici : « C15 Covid Saint Étienne » qui permet certes l’entretien clinique à distance, mais le limite en même temps, par l’absence d’accès visuel au patient. L’attention vers autrui prend ainsi différents chemins technologiques et organisationnels, pour l’analyse d’autres interactions relatives à ce corpus voir Giraud et Bonu, (sous presse).

 

Le care est fondamental dans nos recherches, aussi pour un autre ensemble de raisons. Les actions de Télémédecine visent à pallier la « vulnérabilité sanitaire » des populations situées aux périphéries géographiques et/ou sociales, en France. Cette logique est fortement amplifiée par la pandémie actuelle.  Les habitants en « zone blanche sanitaire » (rurale ou urbaine) en France constituent une catégorie encore plus centrale qu’en temps normal, de l’action publique de la politique sanitaire (Gaille et Terral 2021 : 68)[6].  

 

Dans ce sens, lors de la trajectoire de la diffusion du Coronavirus, nous avons assisté à un changement de statut de la perception de la comorbidité. Indiqué comme un ensemble de facteurs collatéraux, elle a été considérée justement, entrainant des facteurs aggravants, voire déterminants, dans l’issue des cas. L’épidémie de Covid-19 devrait être traitée non pas comme une pandémie, mais plutôt comme une syndémie, c’est-à-dire la rencontre entre une maladie virale provoquée par le Sars-Cov2 et un ensemble de pathologies chroniques, telles que l’hypertension, l’obésité, le diabète, les troubles cardio-vasculaires, le cancer…. Mais une syndémie n'est pas simplement une comorbidité : « les syndémies sont caractérisées par des interactions biologiques et sociales entre des conditions et des états, des interactions qui augmentent la susceptibilité d’une personne à nuire ou à aggraver ses résultats pour la santé (Horton 2020). Les difficultés sociales, par conséquent rentrent en ligne de compte : « Partout dans le monde, les populations les plus fragiles et isolées sont davantage exposées et voient leurs conditions de vie déjà précaires se dégrader : sans-abris, personnes âgées isolées ou dépendantes, familles monoparentales, personnes en situation de pauvreté, femmes, exilés… Cette situation sanitaire exceptionnelle peut également engendrer de nouvelles formes de vulnérabilité et d’isolement, plus difficiles à repérer et à combattre, et ce dans de très nombreux domaines. » (Brooks et alii 2020)[7]. Pour étudier ces différentes formes de care, nous devons les relier à l’action « en train de se faire », dans les interactions, temporellement situées, se déroulant dans des environnements épistémologiques et technologiques complexes, qu’elles-mêmes contribuent à produire. Cet arrière-plan demande des adaptations méthodologiques.

 

  1. Méthodologies ethnographiques pour la Linguistique Interactionnelle

 

Nous situons nos recherches à partir de l’Analyse de Conversation (AC, Sacks, Schegloff et Jefferson 1974) et de la Linguistique Interactionnelle (LI) qui représentent deux disciplines consubstantielles et contemporaines dans leurs naissances respectives. La communauté de la LI est caractérisée par Couper - Kuhlen et Selting (2001 : 3) de la manière suivante : « La linguistique interactionnelle adopte ainsi une perspective interdisciplinaire et translinguistique sur la langue. ». Cette orientation puise dans les approches sociologiques d’Harold Garfinkel et d’Erving Goffman, dans l’Anthropologie Linguistique, dans l’Ethnographie de la Communication aussi bien que dans la dialectologie (de Fornel et Léon ; 2000). En fait, « La pluri- l’inter- et la trans- disciplinarité désignent la manière dont un objet peut être étudié par plusieurs disciplines réunies, abordé à leur intersection, ou se trouver au cœur de plusieurs d’entre elles et traverser leurs frontières. Cette orientation implique une réflexion constante sur les relations entre domaines analytiques et de connaissance » (Cattelin et Loty 2013 : 35 et suiv.). La LI traite la parole comme un produit en cours, où émerge dans un événement sémiotique social et linguistique, un ensemble de ressources pour l'accomplissement d'objectifs ou de tâches, au sein de cet événement » (Couper - Kuhlen et Selting 2001 : 3)[8].

 

Le corpus analysé a été recueilli et mis à disposition par le Docteur François Giraud, médecin urgentiste, ex-directeur du SAMU de Saint Étienne, co-auteur de cet article qui a sélectionné une série d’appels au C15 pendant la toute première vague de la pandémie, plus précisément, le dimanche 15 mars 2020 et participe activement à ces recherches[9]. L’ensemble de ces analyses nous servira à dessiner à la fois certains des défis actuels et futurs de l’interdisciplinarité en HN et à mettre en évidence les retombées de ces réflexions sur notre discipline de départ, la Sémantique Procédurale (dans le cadre de la LI, supra), développée ici dans son versant Interactionnel (certains aspects visuels seront développés plus bas) [10].

 

La méthodologie est structurée autour de « dispositifs de découverte ». Ils participent autant que les choix techniques d’enregistrement à la « construction des données » et en même temps, au maintien d’une orientation d’observation naturaliste sur la constitution endogène des actions conversationnelles, analysées dans ce texte.                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                                

 

Dans les entretiens préalables à l’enquête les informations données par les interviewés, pointent des aspects parfois inconnus pour les chercheurs, mais fondamentaux pour les praticiens. Ces éléments de connaissance orientent les observations à venir et rendent sensibles les chercheurs à des éléments organisationnels potentiellement pertinents dans l’interaction. Dans ce sens, on peut parler de « dispositif de mise en visibilité » nécessaires pour le pointage d’éléments pertinents. L’entretien accompli aussi le rôle de « dispositif de vérification » (post-analytique), puisqu’il confirme (ou infirme) que les cadres d'analyse sont corrects. Dans le cas du « C15 Covid de Saint Étienne », les entretiens avec le Docteur Giraud accomplissent un rôle de proposition et d’aiguillage constant qui représente, dès le départ, une véritable collaboration.

 

Figure 2 Docteur François Giraud

Le recueil des enregistrements, dans ce cas exclusivement sonores, in situ représente le pivot des « dispositifs de découverte », ainsi que la méthodologie principale qui alimente l'analyse interactionnelle. La recherche veut mettre en lumière l'organisation située des actions produites dans les tours, placées dans la progression de l'activité, au moyen de la production de la parole lors de la toute première vague pandémique.

 

Figure 3 Plateau du SAMU Saint Étienne

 

L’objectif des recueils est d’abord « conservatif » dans le sens que l’enregistrement sonore saisit les trajectoires des appels « Covid » d’un SAMU. Il est aussi « reconstitutif », puisque même si le chercheur peut parfois, assister à l’interaction, il ne capture pas les détails pertinents pour l’action en cours pour des raisons de mémoire et de focalisation cognitive.

 

Pour caractériser l’adaptation de la pratique de la transcription au cadre des analyses des interactions du Telecare, en époque pandémique, nous avons besoin de recourir et mettre en perspective avec nos corpus l’orientation de recherche élaborée par Goodwin. En fait, l’organisation interne des échanges est extraordinairement complexe. Elle doit être ré(observée) donc re(constituée) avec l’écoute répétée, couplée à la transcription. Seule une accessibilité illimitée assure ces opérations de description et de découverte. Ces points désormais stabilisés en LI, doivent être développés ici avec un usage raisonné et dynamique de la notion de substrat de Goodwin (2013 / 2016). Ce dernier prend en compte une conception temporelle, à la fois chronologique et interne à l’action dans l’interaction : « L’action est un processus riche, qui se développe dans le temps. Les actions individuelles émergent d’un passé façonné par des chaînes d’actions antérieures. Ce passé fournit un environnement présent et dense, qui contient de nombreux types de ressources différentes. Ces dernières peuvent être décomposées, réutilisées ou transformées de manière sélective, afin d’élaborer les actions suivantes et d’organiser le futur. » (§ 54). Pour soutenir ce processus dynamique dans le temps est nécessaire : « Un substrat [qui] n’est donc pas simplement un contexte englobant, mais plutôt un paysage sémiotique immédiatement présent, offrant des ressources de différentes sortes, qui prend forme sous l’effet de séquences d’action transformative qui culminent, à ce moment-ci, dans l’action en cours… Les participants ne font pas que se servir de ces ressources […], mais ils les utilisent de manière active pour élaborer, de manière concertée, la signification et l’action qui émergent de ce qui précède et qui fourniront à leur tour le matériau pour l’élaboration de ce qui suivra. » (§13).

 

Pour ce faire, les modalités de reconstitution des données sont activement fabriquées par les chercheurs, en LI (au moyen de l’enregistrement et de la transcription). Elles sont caractérisées par une « fixation dynamique » (Bergman 1985, cité par Mondada 2006) du cadre de participation (infra) et du déroulement temporel de l’activité par la capture des événements, par définition « volatiles ». Plus particulièrement, la transcription rend visible d’une manière interprétable et disponible l’interaction, moyennant la compréhension des conventions jeffersioniennes et les pratiques de recherche conséquentes comme donnée secondaire (la primaire étant l’enregistrement, Mondada 2006 : 10).

 

Notamment, le terme « feuilletage/ laminage »[11] est utilisé par cet auteur pour décrire « … cet ensemble de champs sémiotiques divers structuré en couches, ou strates, de ressources de différentes sortes… » que les participants utilisent dans l’action humaine et les échanges ordinaires et institutionnels. Pour rendre compte de cette multiplicité de strates dans l’analyse, une organisation de la présentation visuelle de données ad hoc est nécessaire. On doit alors « …passer d’une conception de la transcription comme pur enregistrement de mots prononcés[12] à la recherche de ce que Wittgenstein appelle une « représentation synoptique » qui « procure la compréhension qui consiste à “voir les connexions” » (2004, § 122, p. 87). Cela invite ainsi à aborder les substrats d’une manière qui est à la fois simultanée et séquentielle, et à regarder en détail la façon dont des champs sémiotiques spécifiques contribuent aux pratiques signifiantes différenciées qui élaborent conjointement des actions particulières. » (§15).

 

Inspirée de ces considérations et en modalité illustrative, la transcription a été établie à partir d’enregistrements effectués avec l’équipe Telesalud, dans la campagne de recueil des données effectuée en 2021 dans le district de Caldas, au centre de la Colombie (Osorio Ruiz et Bonu soumis). En fait, l’image fixe du « dispositif de découverte » constitué de trois prises de vue de la Téléconsultation en cours (une par la caméra in situ en contrechamp et deux par l’écran en vidéocommunication) est enrichie par une transcription multimodale avec des éléments visuels sélectifs de données originales en espagnol, traduites en français. De plus, les images sont mises en relation avec le point correspondant de la transcription. Autrement dit, les flèches mettent en relation la production du médecin avec le déroulement exact de la transcription (flèche a) et l’analyse de la ressource linguistique en espagnol « listo » visant à contrôler la compréhension de la patiente (flèche b). Le tableau permet de visualiser en même temps la ressource linguistique utilisée comme l’une des pratiques, constituant l’ensemble des « pratiques d’action » intonatives et corporelles (Robinson (2007, note 2) et son placement dans le déroulement de l’interaction[13].

 

b

 

a

Figure 4 Enrichissement du Corpus de Téléconsultations de la « Route de la Télémédecine » en Colombie

 

Plusieurs considérations intermédiaires restent à préciser. La notion de substrat marque un élargissement de l’AC (et de la LI), si l’on pense à la première époque de la discipline fondée principalement sur l’interaction téléphonique. Les articles fondateurs de cette période donnent les notions fondamentales adaptées par la suite à l’examen des aspects visuels, corporels, matériels et aux environnements complexes. La définition de la LI que nous avons présenté est déjà élargie par la prise en compte de champs sémiotiques variés. Ce cheminement a commencé lors de l’extension au visuel (Goodwin 1979, Heat 1981) et la relativisation, voire l’abandon, de postures de recherche entièrement « logocentrées » (Mondada 2008).

 

Le dispositif de recherche concrétisé dans la transcription, via la notion de substrat se transforme avec Goodwin (2013), en un instrument qui ajuste l’analyse à la sérialité[14],à la simultanéité et à la séquentialité de l’action notamment en période pandémique. Ces considérations impliquent l’élaboration d’un dispositif d’observation sophistiqué qui ne se limite pas seulement à la transcription sonore, sous la forme écrite qui reste néanmoins une étape immanquable et centrale dans le processus de découverte, mais aussi iconographique et sous d’autres formes textuelles non liées aux conventions conversationnelles. Par conséquent, cette notion de substrat organise à la fois les dispositifs de restitution graphique de l’interaction et structure les notions analytiques (infra) nécessaires à l’examen de l’interaction, spécifiquement en temps pandémique. La prochaine section est consacrée à l’adaptation méthodologique, au moyen d’analyse visuelle à portée sémantique, au processus de sémiotisation de l’air pour comprendre son impact à tous les niveaux des activités humaines, dans cette époque spécifique de crise sanitaire.

 

  1. Les adaptations méthodologiques à la recherche en période pandémique

 

La complexité de la crise provoque une demande urgente institutionnelle et sociale. Elle n’est pas seulement sanitaire ou économique, mais elle implique aussi la demande politique et citoyenne d’études, pour comprendre la situation d’urgence. Cela crée des tendances paradoxales et contradictoires. La focalisation requise majoritairement est nationale et quantitative, tandis que la pandémie est à la fois globale et scalaire, dans des temporalités courtes et de longue portée, dans un croisement entre les impacts sur la vie quotidienne (la syndémie, Horton 2020, plus haut) et l’universalité de ses effets (Pleyers 2020 ; Lussault 2020). Mais, toujours selon Pleyers, sortir de ce « nationalisme » ne doit pas conduire pour autant ni à un « globalisme méthodologique », ni à un « quantitativisme exclusif ». Au contraire, cela nécessite des connaissances empiriques, épistémiques et analytiques de différentes régions du monde, pleinement ancrées dans une réalité à la fois locale, régionale, nationale et mondiale.

 

Nous suivons dans la recherche présentée et dans les autres projets en cours, les préconisations de ce « … plaidoyer pour une sociologie globale à l'heure du coronavirus » (id. 2020) qu’on peut aisément transposer à la recherche interdisciplinaire en HN. Néanmoins, les réponses que Pleyers attend de sa discipline sont exigeantes en termes de détermination de niveaux, de lieux et de méthodologies. Ces obligations sont valables pour toute discipline. Dans ce sens, nous nous inspirons aussi d’un exemple d’adaptation méthodologique commencée bien avant la crise sanitaire, mais accentué considérablement, lors du tout début de la pandémie. Ce changement est représenté par l’élargissement des moyens de recherche de l’épidémiologie, dans un courant centré sur le « numérique » et les Open Data, appelée entre autres dénominations, « Infovirology » (Nsoesie et alii 2019 et 2015). Cette épidémiologie utilise le flux de données non traditionnels, tels que les images satellites et les données disponibles des requêtes laissées sur le Web.  Non seulement, elles s’avérent être des indicateurs précoces d'épidémies, sensibles aux tendances qui ne seront pas détectées par les mécanismes traditionnels de surveillance de la santé publique, ou carrément occultées par les autorités gouvernementales (Nsoesie et alii 2020). D’autres auteurs vont dans le même sens : « Malgré des demandes répétées, les experts de l’OMS n’ont toujours pas eu accès aux échantillons biologiques du début de l’épidémie détenus par la Chine... Dans certains pays comme la Chine ou les États-Unis, il est difficile d’obtenir des informations, notamment sur les virus collectés ou sur les recherches menées dans les laboratoires chinois au moment où l’émergence de l’épidémie reste problématique. En fait, les événements en amont du marché, ainsi que les circonstances qui ont favorisé la propagation du virus au marché, restent un mystère » (Courtier et Decroly 2022). Néanmoins, l’hypothèse des chercheurs d’une genèse précoce est étayée par des preuves épidémiologiques et phylogénétiques indiquant que le virus est apparu dans le sud de la Chine avec une propagation au niveau international, bien avant l'identification du cluster du marché de fruits de mer de Hunan. » (Nsoesie et alii 2020)[15].

 

À côté de ces mutations disciplinaires, les changements perceptifs produit par les images, ont des conséquences dans les pratiques quotidiennes (Garfinkel 2016), et sur la routine habituelle des rencontres (Goffman 1961). Ils sont le produit des « écologies épistémiques » (Goodwin 2016 : § 53) de type pandémique. Celles-ci impactent par conséquent les interactions. Plusieurs chercheurs et journalistes, sous des perspectives différentes ont mis en évidence l’influence de l’arrière-plan perceptuel et épistémique sur les échanges entre individus, notamment sur les ouvertures dans l’interaction. Certains ont remarqué même dans des crises sanitaires anciennes, que les pandémies pouvaient entraîner, notamment sur les salutations, des restrictions sévères, voire leur disparition : « Kill Greetings : Primer for a Pandemic » (Mc Neill 2006). Ces modifications comportementales liées à la pandémie (Mondada et alii 2020) obligent les analystes à (ré) orienter et à adapter l’étude aux changements des pratiques au fondement des ouvertures des interactions.

 

En époque pandémique, les effets universels sur le monde social et sur les rencontres entre humains sont provoqués par la présence multidimensionnelle du virus. Le Covid-19 est « hyperscalaire », présent et agissant à la fois et en même temps, actif synchroniquement à toutes les échelles où le micro-organisme assure sa viabilité. L’entité non humaine du virus opère simultanément sur tous les niveaux de la vie humaine avec une portée inconnue auparavant. Elle est aussi opportuniste et anthropophile comme le moustique tigre, et adaptée à la circulation continue de la mobilisation générale et aux combinaisons « mobilitaires » des humains, dans ce sens elle est aussi « hyperspatiale ». Ces catégories nous les devons au géographe Michel Lussault (2020). Et si chaque individu devient le logisticien potentiel de la vie quotidienne du virus, alors ce dernier est présent/perceptible dans l’infra-, et le supra- situationnel (les occasions sociales de coprésence et les mobilités locales ou spatiales). Moyennant des transformations, le virus joue un ou plusieurs rôles dans l’interaction en continuité avec les dimensions précédentes (Bonu 2022 soumis).

 

L’air, dans la séquence iconographique suivante, passe du statut invisible / imperceptible, bien qu’indispensable pour notre survie, par la respiration, à élément d’abord perceptuel. Il est seulement ensuite, « sémiotisé » au moyen de sa « concrétisation » dans les images. Ce processus n’est produit seulement qu'avec les supports iconographiques, mais ce media y participe fortement, avec bien entendu d’autres moyens textuels et verbaux disponibles dans l’écosystème informationnel, différencié selon les pays.

 

Les images que nous avons sélectionnées schématisent de manières différentes l’exhalation humaine de l’air, d’abord, par l’individu seul, sous une forme schématisée et réduite, (Lynch 1985), dont la respiration subit un début de mathématisation (Figure 5), ensuite  cette diffusion est insérée dans une occasion sociale une table de restaurant, (Figure 6) en présence d’un individu en train d’éternuer, avec une mise en évidence des gouttelettes et de leurs trajectoires « balistiques » (Figure 7) et enfin, une situation schématisée et aussi réduite, localisée dans un espace de représentation visuelle de l’activité expérimentale dans un écran (Figure 8). Cette sémiotisation de l’espace entre les individus et par conséquent des rencontres interpersonnelles a d’abord un effet « hyperscalaire » (Lussault 2020).

 

 

Figure 5 Exhalation et proto-mathématisation

 

Figure 6 Écologie d'une situation sociale

 

Figure 7  La contamination "balistique"

Figure 8 Permanence des gouttelettes dans un écran

 

Ensuite, cette sémiotisation opère dans des périmètres de mouvement plus larges, comme le montrent les images de la raréfaction de déplacement des individus dans l’espace urbain, dans la ville de Rome lors du confinement (Figure 9) et de la circulation automobile dans l’aire de la baie de San Francisco, aux États-Unis (10)[16], produisant ainsi « l’hyperspatialisation » (idem).

 

Figure 9 Webcam dans la ville de Rome

Figure 10 Circulation automobile dans la Baie de San Francisco

 

La représentation des individus, avec la mise en évidence de l’exhalation de l’air de leurs poumons dans des espaces interpersonnels et en mobilité, impliquant potentiellement la transmission virale, représente des corps et des figures catégorielles dans les espaces. Ces « écologies épistémiques » pandémiques, qu’elles soient perceptuelles, expérientielles, épistémologiques, qu’elles se manifestent dans l’iconographie, dans les rencontres entre humains, dans leur coprésence, ou encore dans l’interaction en temps de crise sanitaire, sont redevables d’examen et doivent être soumises à analyse, si nous voulons comprendre ces aspects multidimensionnels. Dans ce sens, ces matériaux iconographiques doivent être mis en perspective avec la Sémantique Procédurale. En fait, les catégorisations des personnes (Sacks 1972a et infra), les définitions des événements (Quéré 1997 ; Traverso et Greco 2016), les formulations des lieux (Schegloff 1972) et l’observation de l’espace urbain (Sacks 1972b) prennent alors place dans les situations saisies par les images et dans les rencontres entre les personnes. Ces procédures sémantiques pratiques constituent activement l’interprétation (explicite ou pas) des images, ou élaborées en « temps réel » dans l’interaction.

 

Par conséquent, nous avons adapté notre conception qualitative et expérientielle des HN, à des formes de Sémantique Procédurale (domaine de la Li, présentée plus haut) aux matériaux visuels. Nous avons développé une perspective de « Praxéologie visuelle » (suivant McBeth 1999), en nous inspirant non seulement des travaux en Sociologie des Sciences (Lynch 1985) et des travaux de Goodwin (2009) sur la vision, dans différentes communautés de pratiques pressionnelles et ordinaires, mais aussi de démarches méthodologiques développées récemment, dans le recueil et l’exploitation des Open Data. Une Sémantique Procédurale (Deppermann 2011a) participe donc de plein droit, à la fois à une « Praxéologie de l’observation » (McBeth 1999 ; Bonu sous presse et Bonu soumis) qu’à une Linguistique des interactions dans les domaines du Telecare et de la Téléconsultation. Nos travaux participent ainsi à la construction d’une sémantique « occasionnée » entendue comme « l'étude des structures des expressions signifiantes dans les occasions actuelles de la conversation » (Bilmes 2011 : 129), ou « interactionnelle », c'est-à-dire, « un ensemble de pratiques organisées » dans la conversation (Deppermann 2011b). Parmi les effets multiples de la crise sanitaire, les changements perceptifs bouleversent les vies et les organisations. Étant donné cet arrière-plan, qu’en-est-il des interactions dans le domaine du processus d’enquête, de diagnostique et, plus largement, du care, supporté par les technologies ?

 

 

  1. L’appel du MR au Requérant dans le « C15 Covid » de Saint-Étienne

 

On pourrait penser que la « sémiotisation » de l’air comme véhicule pandémique pendant la crise sanitaire que nous avons mise en évidence (plus haut et dans Bonu, soumis) n’aurait pas d’enormes conséquences dans les interactions soutenues par les technologies de la distance (le téléphone, dans le Telecare). À plus forte raison, cette prédiction pourrait se confirmer dans les appels entièrement téléphoniques, où aucune coprésence n’est prévue, au moins lors de l’échange entre Requérant (R), qu’il soit Patient (RP) ou Tiers (RT) et Médecin Régulateur (MR). En revanche, les conséquences de la crise sanitaires en cours sont multiples dans tous les échanges sociaux tout aussi bien présentiels que distanciels.

 

L’examen de séquences qui caractérisent ce type d’activité déployée dans l’appel, extrait du corpus « Première vague du Covid au SAMU de Saint Étienne » doit prendre en compte à la fois la « sémiotisation » de l’air pendant la crise sanitaire, ainsi que la sollicitation de l’arrière-plan de connaissances très rudimentaires en ce qui concerne le nouveau virus et disponibles à ce moment en ce qui concerne les pathologies virales, déjà connues par les médecins. Ce panorama fournit les éléments du substrat et des ressources d’origines diverses utilisées potentiellement par les participants pour mener à bien leur participation aux interactions médicales, en début de la crise[17]. L’objectif est alors de montrer comment les outils conversationnels (les procédures) s’adaptent à la situation pandémique et comment des éléments d’arrière-plan sont mobilisés par les interactants, professionnels ou profanes. Ces ajustements et connaissances permettent aux institutions de continuer à fonctionner au moyen de nouvelles configurations dans les interactions institutionnelles, y compris en temps de crise. Ces dernières ne représentent pas le produit de ces chambardements, mais ils en constituent, dans une perspective réflexive, à la fois le moteur et le véhicule.

 

En fait, Heritage et Clayman (2011 : 21 et suiv.) nous permettent de concrétiser deux conceptions des institutions et entités sociales, deux visions du discours et du contexte social : le seau contre la route de briques jaunes (the Yellow Brick Road) :

 

« La vision traditionnelle de la relation entre l'interaction et son contexte c’est ce que nous appelons la « théorie du seau ». L'image dominante de cette relation est celle d'un récipient qui « contient » l'interaction comme un seau contient de l'eau. En général, la théorie du seau suppose que l'interaction s'adapte au contexte, comme l'eau le fait dans le seau. En tout état de cause, le seau n'est pas significativement altéré par les interactions qu'il contient. Il est facile de voir comment cette image surgit et semble si convaincante[18]… Notre alternative à la théorie du seau se résume par une image inoubliable associée au film Yellow Submarine des Beatles. Dans cette image, les Beatles marchent et, à mesure qu'ils avancent, une route de briques jaunes (comme celle du Magicien d'Oz) se matérialise et se forme sous leurs pieds. Leurs pieds marcheurs forment la route. »

 

Nous allons compléter au moyen de la notion de substrat (présenté supra) cette vision que bien entendu, nous partageons, à l’aide ici aussi de matériel iconographique et d’un exemple vidéo[19].

 

 

Figure 11: Le tapis déroulé

 

 

                                                                                                                                                                                                    « Figure 11 « Pas à pas » sur le lac gelé

                                                 

« Leurs actions [des Beatles] construisent la route sur laquelle ils voyagent. En appliquant cette image à l'interaction, nous considérerons que le contexte social n'est jamais indépendant des actions (Duranti & Goodwin 1992). Au contraire, les personnes créent, maintiennent ou modifient en permanence les circonstances sociales dans lesquelles elles sont placées – quelle que soit l'ampleur, voire l'oppression, de ces situations « prédéfinies » – et elles le font dans et à travers les actions qu'elles accomplissent. » Heritage et Clayman (2011 : 22).

 

Nous avons vu (supra) que la notion de substrat et le processus de « sémiotisation de l’air » en temps pandémique posent le besoin d’une adaptation dans les modalités de construction, d’élaboration et de présentation des données dans la transcription, puisque le souhait de Goodwin (2013) est de mettre à disposition à la fois la matérialité de l’espace signifiant pour les participants (dans le jeu de la marelle (2000), ou chez les archéologues (2010), par exemple) avec des champs sémiotiques hétérogènes, mais fondamentaux dans la production et la compréhension de l’action et de l’interaction. Les champs sémiotiques peuvent ainsi être multiples et pertinents en même temps pour l’action en cours : « … dans la structure sémiotique fournie par une grille de marelle, les seules actions pertinentes sont celles qui s’inscrivent dans un medium qui permet à des corps, réels, pesants, de sauter dans ses cases. Chacune des contextures de ces formes sémiotiques particulières (structure lexicale, prosodie, agencement des corps) organisées dans un medium spécifique peut être appelé un champ sémiotique, et l’ensemble des champs sémiotiques auxquels les participants ont visiblement recours pour élaborer leur action du moment peut être appelé une configuration contextuelle. Cette hétérogénéité productive, cette capacité à élaborer l’action par l’usage simultané de différents types de matériaux, est au cœur de l’action humaine. ».

 

Cette citation de Goodwin peut être illustrée et développée par la vidéo du Groupe Gotan Project qui associe la marelle (Rayuela) et le tango[20]. La vidéo est disponible à cette adresse (consultée le 20 décembre 2022). Son visionnage nous semble indispensable pour comprendre pleinement les propos qui suivent :

 

https://www.youtube.com/watch?v=Zf6J-Hg_YWo&ab_channel=UniversalMusicFrance

 

Cette action créative croise la marelle non seulement avec le tango et la musique afférente, mais aussi avec des voix, l’une individuelle, parlée, sous le registre de la narration, l’autre d’un chœur d’enfants, chantée. Cette dernière met en relation le jeu et la dance. Elles accomplissent plusieurs systèmes sémiotiques utilisés en même en temps, dans une modalité sérielle et/ou en même temps et/ou séquentiellement, par les personnes engagées dans l’activité coordonnée de la danse et dans la création artistique. Nous les mettrons en relations avec les différentes étapes de l’interaction analysée, dans les transcriptions présentées plus bas.

 

Figure 12 « Rayuela » Tango et marellle

 

En fait, l’agir organisationnel implique réflexivement des conséquences interactionnelles dans le traitement des appels à la cellule dédiée « Covid ». Dans ce sens, l’ordre des participants est inversé par rapport à l’appel d’urgence classique. L’appelant est le MR, l’appelé est le demandeur. Ce dernier a déjà contacté les services d’urgence. Étant donné l’explosion du nombre des appels concernant la pandémie, le service décide d’ouvrir une « cellule de crise Covid ». Après un premier appel sur des suspicions de contagion, les Auxiliaires de Régulation Médicale établissent alors une liste de personnes à rappeler par le médecin. Ce dernier échange avec le demandeur et sollicite des informations pertinentes dans le cadre viral épidémique. L’une des difficultés pour le MR est la suivante : « C’est une maladie qui présente un éventail de symptômes très large : d’abord il y a ceux qui n’en ont aucun, d’autres ont de symptômes respiratoires, d’autres encore neurologiques, fatigue, des anosmies ou des agueusies, troubles digestifs, certains avec un état fiévreux, d’autres sans fièvre… »[21]. D’autant plus, que les signes cliniques « habituels » se superposent souvent aux symptômes pandémiques : « Les maladies des voies respiratoires supérieures (rhume, angine streptococcique, bronchite et otite) sont peut-être les exemples classiques de maladies de routine et représentent environ 30% des visites médicales pour de nouvelles pathologies aux États-Unis » (Heritage et Clayman 2011). La demande porte ainsi sur le contrôle de l’adéquation des symptômes avec la pathologie virale, ou la recherche d’informations (une minorité d’appels concerne l’urgence) en donnant tous les renseignements nécessaires. Nous présentons, à la suite, des séquences extraites d’un même appel.

 

L’orientation des contributions interactionnelles dans la pratique du care doit être expliquée en termes non seulement de l’agencement des tours et des configurations séquentielles, mais aussi avec l’examen du fonctionnement, dans le déroulement temporel de l’interaction, des Dispositifs de catégorisation (Sacks 1972a, voir note 24), des collections de catégories, de focalisation cognitive différenciée de la part des participants et des connaissances disponibles à ce moment spécifique, pour les régulateurs et pour le grand public[22].

 

Le tango est dansé dans le système sémiotique posé par les cases de la marelle, comme le chœur d’enfants le chante : «  siete, ocho, nueve diez hay que saber mover los piez » (sept, huit, neuf, dix, il faut savoir bouger les pieds).

 

L’interaction avec le médecin prend une trajectoire connue et attendue, celle de la consultation de médecine générale (l. 11).

Figure 14 Tango dansé dans le système de la marelle

 

Figure 15 : Séquence_1_Transcription_Giraud 4, l. 1 - 19

 

Dans la Séquence d’ouverture, la mère se positionne et elle est perçue comme d’abord la « porte-parole » de « l’équipe famille » et seulement ensuite, sera traitée interactionellement en tant que patiente à part entière. L’auto-identification (à la fois catégorielle et nominale) de l’appelant est suivie d’un rappel assez précis de l’heure du premier échange de la Requérante avec le SAMU, ce qui place l’échange analysé non seulement dans une série d’appels (Button 1991) mais aussi dans le substrat de l’organisation de l’aide et de la connaissance sur l’actualité sanitaire.

 

MR pose une question assez ouverte pour déclencher le « rappel » de la première demande[23]. Si l’on peut observer qu’il y a bien inversion de l’ordre des participants en relation à l’appel d’urgence « classique », nous constatons qu’après l’identification de l’appelant, le MR du SAMU, on rétablit vite l’initiative interactionnelle du médecin (l. 11) MR : « >qu’est-ce qui vous amène<» : ce qui produit une description symptomatique du problème relativement étendu de la part de l’appelé, en relation à la requête des appels d’urgence. L’initiative de l’appel revenant à MR (le « rappelant ») semble produire deux conséquences :

 

a) une implicitation du bien-fondé du recours au SAMU de la part du Requérant ;

b) MR satisfait l’obligation morale « supra-conversationnelle » (Watson 1994) du SAMU engagée par l’ARM, lors du premier appel, de la promesse d’un rappel de la part de MR.

 

On peut faire l’hypothèse que les deux dimensions contribuent au déroulement généralement « paisible » de ces appels spécifique du corpus analysé. En fait, entre autres effets, le Requérant se trouve allégé de la tâche de convaincre de « l’urgentabilité » de son appel.

 

Néanmoins, l’inversion de l’ordre Appelé - Appelant habituel dans les échanges des SAMU ne change pas complétement le système des droits et obligations mis en place par l’ouverture de l’échange téléphonique. On s’oriente ainsi vers une configuration séquentielle plus proche de l’interaction médecin patient, lors d’une consultation « routinière », (Heritage & Clayman 2011 : 71). À la ligne 19, MR produit une Unité de Construction du Tour[24] ­>d’accord<­. Elle marque la réception de ce qui vient d’être dit et fait et projette en même temps, un changement de position interactionnelle par la production d’autres UCT de la part de MR. Ces UCT commencent la Séquence Interrogative sur les symptômes manifestés par les enfants. Nous sommes là dans des attentes stabilisées de la part de MR, la mère se positionne comme « porte-parole » des enfants et de la famille.

 

Après avoir présenté la maladie comme concernant l’un de ses fils, la Requérante centre le récit sur l’état de santé de l’ensemble de ses trois fils (avec une autoréparation, dans son propre tour, l. 12 et 13)[25]. Le Dispositif utilisé est celui de type équipe, la famille : Mère - enfant et même si le père n’est jamais évoqué[26]. Or, la mère (avec le père) est celle qui a le plus de droits ainsi que d’obligations dans l’activité de chercher de l’aide, si elle ne peut pas la dispenser elle-même (Sacks 1972a). La narration est constituée à la fois avec une orientation dans le passé et avec une chute positive clôturant la narration, sur le rétablissement des enfants, l.13. Le récit est produit avec des verbes au passé et le développement temporel de la narration dans un parcours thérapeutique attendu qui va de la constatation de la maladie des enfants, passe par la consultation chez le généraliste et termine par l’amélioration de la situation. Cet aboutissement devrait permettre un changement thématique cohérent sur les conditions actuelles de santé de la mère, puisque l’épisode concernant les enfants semble définitivement clos, mais MR reste focalisé sur les enfants et la détermination de leurs caractéristiques. Le point saillant projeté qui concerne en revanche, la santé de l’appelante elle-même, la mère des enfants, n’est pas traité dans l’immédiat. Il est certes en construction aux l. 14 et 16. Mais l’intervention de MR en l. 17 constitue une interruption (voir par exemple, Schegloff 2002, sur les interruptions) du tour en construction de la locutrice précédente. Le tour de MR reste thématiquement centré sur les enfants et leurs caractéristiques, leurs âges et leurs problèmes. La Requérante ne peut revenir sur l’action projetée qu’en l. 32. Elle peut enfin exprimer ses symptômes et être interrogée sur son état de santé (l. 34 et suiv.). Tout de suite après, elle fournit une autre information catégorielle potentiellement et implicitement importante qui la concerne, elle est enceinte (l. 39).

 

En concertation avec la voix off d’un narrateur : « te basta serrar los ojos por recomenzarlo todo » (il te suffit de fermer les yeux pour tout recommencer). Les danseurs exécutent une figure à l’intérieur du schéma de la marelle à la fin d’un segment du récit. La narration rentre à la fois dans la danse et dans la marelle.

 

Dans l’appel, RP peut faire valoir sa position de patient potentielle qu’elle tentait de placer à la fin de sa narration. L’écoute du médecin dans son enquête et l’action interactionnelle projetée par la locutrice se rejoignent enfin (l. 32 - 34).

Figure 16 Narration, tango et marelle

 

Figure 17  Séquence_2_Transcription_Giraud 4 l. 32 - 42

 

Cette dernière appartenance catégorielle (l. 40) sera traitée dans la suite de l’interaction, mais elle est dé-thématisée, dans les séquences suivantes. Les différentes interventions de MR font état de la non spécificité de la catégorie « dame enceinte » à l’aune des connaissances et des consignes de l’Autorité Sanitaire au moment de la première phase de la pandémie.

 

 

Figure 18 Séquence_3_Transcription_Giraud 4 l. 61- 66

 

Les outils de MR sont limités. Il peut préconiser le test, l’arrêt de travail ou l’isolement du requérant. Dans ce cas, il se limite à conseiller la prise d’un antalgique, le « Doliprane », et dans la suite de l’interaction (non reproduite ici) il rappelle les conseils de comportement pour limiter la propagation virale : « Un substrat n’est donc pas simplement un contexte englobant, mais plutôt un paysage sémiotique immédiatement présent, offrant des ressources de différentes sortes, qui prend forme sous l’effet de séquences d’action transformative qui culminent, à ce moment-ci, dans l’action en cours. […]Les participants ne font pas que se servir de ces ressources […], mais ils les utilisent de manière active pour élaborer, de manière concertée, la signification et l’action qui émergent de ce qui précède et qui fourniront à leur tour le matériau pour l’élaboration de ce qui suivra (Goodwin 2016 § 13). Dans ce cas, le substrat fournit des ressources limitées aux préconisations médicales habituelles en termes de diagnostic et de suivi. L’activité se centre alors sur l’antalgie et l’apyrexie, sur le conseil et sur une certaine forme de care.

 

  1. Pas de solutions pour MR, mais bienveillance des requérants

 

On peut s’interroger tout au long du déroulement de l’interaction sur comment définir l’activité, ou mieux encore, les activités en cours. Il nous semble que la séquence de clôture condense bien les difficultés auxquelles sont confrontés les participants.  

 

La Requérante - Patiente se rend compte que la question qu’elle se posait lors du premier appel au SAMU n’a pas reçu de réponse. La demande porte ainsi sur le contrôle de l’adéquation des symptômes avec la pathologie virale, ou la demande d’informations en donnant tous les renseignements nécessaires. Sa question est produite avec des éléments vocaux (hausse du volume, rythme rapide, intonation montante de la dernière Unité de Construction du Tour) qui montrent qu’elle profite de la dernière place possible pour poser la question (mal placée séquentiellement, Sacks 1992) qui correspond au motif de sa demande initiale dirigée vers la structure médicale : « >Dça peut pas être unea coronaD< ­non­ » (l. 89).

 

La réponse de MR (l. 90 - 93) rend interactionnellement caduque la question posée, puisque le but pour le médecin n’est pas de discerner une pathologie d’une autre, comme dans le traitement de l’urgence en temps non pandémiques. Il ne se propose pas non plus d’identifier, via le test, les cas de Corona Virus, mais celle de distinguer les cas légers de ceux graves, voire très graves, nécessitant une hospitalisation immédiate : « C’était principalement un travail de tri au milieu de tous ces appels, pour pêcher la personne : âgée, qui toussait depuis un jour ou deux, avec comorbidité, qui était gênée pour respirer et là on rebasculait au SAMU » (EDFG). Or la Requérante, même si elle est fiévreuse et enceinte et même si les connaissances sur cette catégorie spécifique (femme enceinte) sont loin d’être stabilisées (l. 91, 92), elle ne fait pas partie des catégories susceptibles d’être hospitalisées.

 

 

En fait, le tango peut être aussi dansé en dehors des cases de la marelle et avec un nouveau champ sémiotique. Les cases de la marelle se transforment en images en mouvement, probablement celles du narrateur. La musique du tango accompagne les danseurs hors marelle.

 

Nous sommes dans d’autres activités qui ne relèvent pas de l’urgence au sens propre, mais plutôt du Telecare. Plusieurs ressources sont mobilisées en même temps par le médecin pour arriver à la clôture de l’interaction : les critères de gravité en vigueur, la prise en compte habituelle de la femme enceinte comme catégorie habituellement sensible, mais non éligible, dans le cas présent, l’absence de préconisations, sauf dans le cas de difficultés respiratoires sévères. On cherche le cas « grave ».

 

Figure 19  Le tango dehors de la marelle

 

 

 

Figure 20 Séquence_4_Transcription_Giraud 4 l. 88 - 101

 

De ce fait, le médecin fait un travail d’explicitation (l.91) à la suite des remarques et des questions de la locutrice, d’une sorte « d’urgentabilité » ad hoc, limitée et ciblée dictée par les directives de l’Autorité Sanitaire concernant la situation pandémique : « … si nous analysons des appels d'urgence au 911 ou des entrevues de presse, nous voulons être en mesure de montrer que, et comment, les participants mettent en scène la dimension « urgence » Cette entreprise fait face à une grande variabilité des appels que l’on peut observer : «  Il y a des appels personnels au 911, des canulars et des appels de personnes qui pensent que le 911 devrait trouver leurs clés de voiture ou parer à des attaques venant de l'espace ! Le statut « d'urgence » d'un appel et son caractère « impersonnel » exigent bien plus qu’appeler le 911. » (Heritage et Clayman 2011 : 22). En l. 95 - 97 en revanche, une possibilité d’intervention d’aide est envisagée, mais elle reste hypothétique, en cas de difficultés marquées de respiration. Ce qui permet au médecin d’amorcer la séquence de clôture, vers laquelle la locutrice s’oriente, sans aucune réticence interactionnelle.

 

  1. Conclusions

 

L’activité des soins dispensés à distance lors d’une situation « exceptionnelle » dans un cadre d’échanges d’appels (entrants et sortants) avec le SAMU montre l’adaptation des outils conversationnels et des actions de la part des participants à l’interaction observée : « Les situations ne « contiennent » pas d'actions ; au contraire, les situations sont créées, maintenues ou modifiées par leurs actions constitutives. Le « contexte » est le projet et le produit des propres actions des participants. Les participants mettent continuellement en scène le contexte, rendant sa pertinence disponible dans et à travers leurs contributions à l'interaction. » (Heritage et Clayman 2011 : 21, 22).

 

Nous avons montré ainsi que le care est analysable dans les différences formes organisationnelles et technologiques de Soins à Distance comme relevant de l’action et de l’interaction humaine. Nous rajoutons ainsi aux différentes acceptions du care que nous partageons avec d’autres disciplines (Science Technology Studies, sociologie, philosophie féministes et intersectionalistes, etc.), celle d’une entité qui équivaut à des actions se déployant dans l’interaction. Et comme cette dernière, le care est redevable d’un examen détaillé et précis. Cette interdisciplinarité a vocation à être élargie dans le sillage des mutations méthodologiques évoquées dans le corps de ce texte. En fait le Docteur Giraud quand il a recueilli et mis à disposition des chercheurs en LI ce corpus, n’a pas seulement donné accès à des matériaux spécifiques d’un corpus interactionnel rare, voire unique. Il donne aussi un aperçu des connaissances médicales qui se déploient dans la pratique du personnel médical dans l’entretien clinique téléphonique. Par conséquent il est tout aussi important d’analyser les appels où l’on constate de l’Urgence Absolue (UA) dans le domaine par exemple des troubles cardiaques pouvant aboutir à des infarctus (Bonu en préparation), des échanges relevant de Soins Non Programmés (Robert 2022) aussi bien que d’examiner le corpus historiquement situé des appels, lors de la première vague pandémique Corona Virus de 2020[27].

 

Les communautés de l’AC et de la LI, mais aussi, plus largement les « Sciences Humaines Numériques » peuvent largement profiter à la fois de l’évolution en cours des Open Data et de leurs potentialités, ainsi que de l’héritage ouvert par les travaux de Charles Goodwin. Dans ce texte, nous avons mis en perspective les deux orientations à la fois dans les pratiques de recherche (la présentation de la transcription) et dans notre contribution à l’analyse des appels au SAMU en période primo-pandémique. Plus largement, nous contribuons à la compréhension du déploiement du Telecare dans le socle de l’interaction supportée par les technologies, dans notre cas, le téléphone. Notamment à l’élargissement opéré par cet auteur de la perspective fondamentale de la séquentialité (remarqué par Greco et Mondada 2021), nous rajoutons des éléments d’analyse, des dimensions sérielles des appels au SAMU en perspective de la relation réflexive avec l’organisation et le substrat disponible à l’époque pour les interactants. L’enrichissement de ce corpus spécifique par des présentations des transcriptions ad hoc et nos analyses afférentes de l’interaction constituent notre contribution à la conception des Humanités Numériques dans l’Unité de Recherche LHUMAIN et un apport original aux recherches sur les Soins à Distance, en époque pandémique.

 

 

 

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Annexes Conventions de Transcription

 

 

 

[1] Elles-mêmes interdisciplinaires depuis leurs origines, voir plus bas.

[2] L’origine historique des HN remonte au travail entamé en 1949 par le jésuite italien Roberto Busa avec IBM, souvent cité comme pionnier, avec sa concordance de l'œuvre de Thomas d'Aquin (Wikipédia site consulté le 16 août 2022). Ensuite, les travaux dans ce domaine se sont élargis au-delà de la mise à disposition computationnelle ou des versants exclusivement quantitativistes pour prendre l’acception défendue ici de « sciences humaines numériques ». Dans notre perspective, les technologies font l’objet d’études sur leurs usages, à la fois dans les activités analysées, mais aussi dans les dispositifs de recherche (enregistrement, transcription, traitement, archivage, etc.).

[3] Plus particulièrement, « …les soins psychiques en ligne se caractérisent aujourd’hui par l’importance de l’interaction en téléconsultation, c’est-à-dire l’usage de la vidéocommunication dans le cadre d’une prise en charge en santé mentale “à distance“ en mettant à l’arrière-plan l’interaction en face à face avec le psychothérapeute. La pratique professionnelle est désormais associée à nombre de standards du e-commerce et à ses modalités usuelles de légitimation (accessibilité, disponibilité, moindre coût, évaluation par les usagers, etc.) » (Mathieu Fritz 2018 : 125).

[4] (Field 1996) https://www.hellocare.pro/telemedecine-en-france. Consulté le 15 décembre 2022.

[5] Entretien avec l’historienne Françoise Hildesheimer, par Françoise Fressoz, Le Monde du 16 mai 2020.

[6] Cet argument motive toute une série d’actions en France, par la conception de « Tiers Lieux » (Plan Santé 2030) pour pallier à l’isolement médical de certains catégories et zones géographiques.

[7] L’émission « La suite dans les idées » consacrée aux Sciences Sociales à France Culture a dédié un numéro à cette thématique : https://www.franceculture.fr/emissions/la-suite-dans-les-idees/la-suite-dans-les-idees-emission-du-samedi-09-janvier-2021. Consulté le 4 mars 2021. Voir aussi l’article de Richard Horton, rédacteur en chef de la revue The Lancet : https://www.thelancet.com/journals/lancet/article/PIIS0140-67362032000-6/fulltext

[8] Par un souci de brièveté nous référerons désormais à la LI, sans rappeler à nouveau la relation étroite entre les deux disciplines. Sur les relations entre ces orientations théorico-analytiques, voir Fox et alii (2013), ainsi que Mondada (2008). L’orientation élargie de l’analyse linguistique écologique est cohérente avec l’usage de certaines des notions développées par Charles Goodwin (1943 – 2018) dans l’analyse de l’action humaine fondée sur une multiplicité de ressources sémiotiques.

[9] L’analyse d’un échange entre deux médecins appartenant à ce corpus est en cours de publication dans Giraud et Bonu (2022, sous presse). Ce projet est mené en codirection avec Natalia Osorio Ruiz, docteur, de LHUMAIN : « L’Entretien Clinique Téléphonique en temps de PANdémie : le bouleversement social de la maladie » (ECTPAN) en collaboration avec le SAMU de Saint Etienne (financement biennal 2021 - 2022, par la MSH SUD de Montpellier).

[10] D’autres projets font partie de l’ensemble de recherches que nous avons nommé « Telecare, Télémédecine et Humanités Numériques » (TTHN). Ils portent sur les Centres 15 de Perpignan et de Saint Étienne (Robert 2022), sur l’addictologie ou encore sur la Téléconsultation phygitale en France et en Colombie. Ces projets bénéficient de financements nationaux et internationaux.

[11] Il y a une différence entre le terme en anglais dans l’article de Goodwin (2013) « Laminated action » et ceux utilisés dans la traduction de Kreplak, (2016) « feuilletage » et dans l’article de Quéré (2016), « lamination », dans le même numéro de revue. Néanmoins, les deux semblent couvrir l’ensemble des significations possibles en français.

[12] Cette expression, si mal interprétée, pourrait escamoter l’une des avancées de l’époque fondatrice de l’AC, la prise en compte de la dimension vocale, à côté de l’aspect verbal de la production du tour de parole. La modalité de la transcription à « orthographe modifiée » prend en compte, par l’adaptation de l’usage de la ponctuation aux aspects vocaux. Ils sont liés à la fois à la production qu’au passage de la parole, les deux sous domaines de l’organisation du tour de parole.

[13] Ce projet est lauréat de l’appel ECOSNORD 2020 : « Téléconsultation et “Médias Mobilies Positionnels” dans l’urgence de la pandémie COVID-19 en France et en Colombie » (C21HS01). Il est mené en collaboration avec Esteban Granada Aguirre, Laboratoire Telesalud, Faculté de Santé Université de Caldas à Manizales, avec un financement franco-colombien triennnal 2021 - 2023 (Ministère de l’Europe et des Affaires Étrangères MEAE, Ministère de l’Enseignement Supérieur, de la Recherche et de l’Innovation, MESRI France ; Ministère de la Science - Colciencias, Colombie).

[14] Il nous semble important de rajouter ce terme à la liste des dimensions évoquées par Goodwin, puisque les interactants prennent en compte aussi les éléments qui se produisent en série, dans l’activité de flux des appels au SAMU, ou dans des appels successifs concernant un seul requérant (voir plus bas Séquence 1 l. 9 et 10).

[15] L’enquête reste ouverte dans la détermination du moment et du lieu d’apparition du Sars Covid-19, puisqu’ils subsistent des fortes incertitudes : « À ce jour, ni les virus progéniteurs (ancestraux) de l’épidémie, ni l’animal responsable des premières transmissions du virus à l’espèce humaine n’ont été identifiés. » (Courtier et Decroly 2022).

 

[16] Sources des images : Stv Repubblica, France Info, RTBF. Une place spécifique dans notre démarche est occupée par le journalisme activiste https://www.newsy.com/series/newsybellingcat/. Nous développons une analyse de ces démarches dans un autre travail en cours.

[17] Les appels ont été enregistrés le dimanche 15 mars 2020. La « cellule de crise » a été mise en place le 13 mars. Les premiers cas en France sont attestés fin février, début mars. Les médecins recevaient à ce moment-là des directives de l’Autorité Régional de Santé (ARS) « plus ou moins claires » (Intervention du Docteur François Giraud au Workshop du 15 novembre 2021, à Montpellier, organisé par l’Unité de Recherche LHUMAIN).

[18] Ces auteurs opposent un cadre institutionnel comme un amphithéâtre universitaire qui pourrait de premier abord, faire croire à la « théorie du seau », à un premier rendez-vous comme exemple paradigmatique d’actions uniques qui transforment le contenu et le sens du rendez-vous. Plus bas, nous montrerons au moyen de matériaux iconographiques, cette relation réflexive entre la mise en place de la « Cellule Covid » et les interactions qui sont accomplies dans son sein.

[19] Ces images sont tirées d’un des sites consacrés à l’œuvre du poète espagnol Antonio Machado (2003) et de son poème plus connu : « Caminante no hay camino » : https://www.espoesia.com/poesia/antonio-machado/caminante-no-hay-camino-antonio-machado/ qui poétise l’idée du façonnement progressif d’un itinéraire par l’acteur lui-même : voyageur, migrant, exilé, etc.

 

[20] Merci au collègue de l’Unité de Recherche LHUMAIN, Felix Luska pour avoir proposé et mis à disposition des membres de l’unité, cette vidéo.

[21] Propos extraits des Entretiens enregistrés en audiovisuel, avec le Docteur François Giraud (désormais EDFG) qui alimentent constamment le travail sur ce corpus.

[22] Nous avons défendu, à plusieurs époques, cette orientation analytique de l’interrelation entre organisation de l’interaction et les « pratiques culturelles méthodiques de catégorisation » (Watson 1994). Nous l’avons mise en relation avec les débats scientifiques qui ont traversé les champs de l’AC et de l’Ethnométhodologie, dans plusieurs textes (Bonu 2014 et 1998, ainsi que dans Bonu Mondada, Relieu 1994).

[23] La modalité de construction de la première demande est assez ouverte. Elle est semblable à la façon de constituer le premier tour du médecin dans l’interaction avec un patient dans une consultation de médecine générale. En revanche, dans les appels d’urgence, c’est l’appelant qui produit systématiquement le premier thème, souvent sous la forme d’une requête de personnel ou de moyens (ou les deux), avec explication du problème comme motivation de l’appel. Cette modalité représente un moyen de mobiliser un outil et une forme interactionnelle assez partagée et de déployer l’enquête sélective de MR (plus bas).

[24] L’UCT est un élément de production du tour de parole qui peut, mais pas obligatoirement, constituer un tour complet. Une séquence est une suite d’au moins deux tours avec des relations de dépendance (comme la Paire Adjacente dont une des classes possibles est formée par l’appariement Question - Réponse).

[25] Les échanges au SAMU impliquent toujours une série d’intervenants (au minimum l’ARM et MR dans la suite de plusieurs appels) et des participants de côté du Requérant (Tiers professionnels ou profane, proche, ami, membre de la famille). Ici, il s’agit plutôt de l’appartenance catégorielle qui projette la prise de parole de la mère au nom de « l’équipe famille ».

[26] Les dispositifs de catégorisation (Dc) impliquent non seulement des collections de catégories, des ensembles cohérents pour caractériser soit une population toute entière (âge, sexe, nationalité, pour caractériser des groupes avec une taille non prédéterminée, DcPn), soit un groupe limité (famille, équipe sportive), avec des places que l’on peut anticiper, selon le collectif en question, « le père, le défenseur central », soit encore un appariement de catégories (médecin – patient, ami – ami), dans une paire relationnelle standardisée, PRS) mais aussi leurs principes d’application, simples, en nombre limité, contextuellement adaptés, mais extrêmement productifs (pour une argumentation plus détaillée, voir Bonu 2014).

[27] « [L’accomplissement] est inévitable en raison de la relation réflexive entre l'action et le contexte qui, selon Garfinkel (1967), est endémique à l'action humaine. Et il en est ainsi même pour les actions les plus « routinières » car, étant donné que les circonstances d'aujourd'hui vont être différentes de celles de demain, même les actions répétées sont refaites. Dans cette vision des choses, les actions sont réflexives, dynamiques et renouvellent le contexte. La stabilité de la situation est tout aussi dynamique que le changement de situation, car les deux se produisent à travers les mêmes processus réflexifs. Les situations ne « contiennent » pas d'actions ; au contraire, les situations sont créées, maintenues ou modifiées par leurs actions constitutives. Le « contexte » est le projet et le produit des propres actions des participants. Les participants mettent continuellement en scène le contexte, rendant sa pertinence disponible dans et à travers leurs contributions à l'interaction. » (Heritage et Clayman 2011 : 21, 22).

 

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