1. INTRODUCTION : LA NÉCESSITÉ DE SORTIR DU CARCAN DE LA DIDACTIQUE
Depuis l’aggravation du conflit syrien et la déliquescence de l’État libyen au milieu des années 2010, la multiplication des camps de migrants aux portes de l’Union européenne devient une réalité. Elle consacre une « Europe forteresse » dont l’approche hotspots, qui sera présentée dans la première partie, est devenue la pierre angulaire alors que, selon la Commission européenne (CE), elle « vise à apporter une assistance immédiate aux États membres exposés, en première ligne, à des pressions migratoires disproportionnées aux frontières extérieures de l’Union européenne (UE) » (Tassin, 2016).
Au-delà d’une réflexion sur le développement d’écoles dans les camps, ma recherche analyse les influences réciproques entretenues par les deux objets. Elle apporte une contribution au champ de la sociologie des migrations en décrivant la production de rapports sociaux modifiant durablement et en profondeur la structure des camps. Jusqu’alors, la littérature sur l’éducation en contexte de camp était peu fournie (Cooper, 2005 ; Lanoue, 2006 ; Fresia, 2007 ; Dryden-Peterson et al., 2015). Par conséquent, elle se concentrait sur des aspects pratiques, focalisés sur l’enfant et sur les modalités d’apprentissages (Arvisais et Charland, 2015). De fait, les réflexions sur la raison d’être d’une institution éducative à l’intérieur du camp ou son importance pour la famille des élèves restaient des dimensions peu explorées.
En contexte migratoire, un phénomène d’inversion des générations (Moro, 1998) a été théorisé, aboutissant à une parentification des enfants (Boszormenyi-Nagy, 1965). Tandis que l’inversion des générations semble se construire sur les lacunes des parents dans le domaine langagier et leur compréhension du monde extérieur tandis, les enfants appréhendent mieux ces dimensions (Moro, op. cit.) qui sont intégrées via les institutions éducatives. Mes terrains d’enquête semblent démontrer qu’en contexte de camp, ils finissent par occuper des fonctions d’interprètes et de médiation avec la société d’accueil. Le phénomène de parentification peut alors être défini comme suit :
Un processus relationnel interne à la vie familiale qui amène un enfant ou un adolescent à prendre des responsabilités plus importantes que ne le voudraient son âge et sa maturation dans un contexte socioculturel et historique précis et qui le conduit à devenir un parent pour ses (ou son) parents (Le Goff, 1999).
Je démontrerai que le phénomène est surmultiplié dans les camps et qu’il se concrétise par une véritable inversion de la parentalité, dépassant celle des générations. Je retiendrai dans mes développements une conception de la parentalité qui se dessine depuis la fin des années 1990, alors que les chercheurs qui travaillaient la notion s’inscrivaient dans un cadre pluridisciplinaire et pluridimensionnel entre les aspects juridiques (à qui est dévolue la compétence), pratiques (comment elle est déclinée) mais aussi subjectifs puisqu’il n’existe pas une mais des façons d’exercer la parentalité (Houzel, 1999). Dès lors, il s’agit de considérer que la parentalité est un concept particulièrement mouvant et une expérience, plutôt qu’une pratique, d’autant plus qu’elle n’est pas toujours l’apanage de parents directs et peut être exercée par d’autres autorités. Le concept de parentalité a fait consensus dans les années 2010, dans le cadre d’une définition applicable sur mes terrains d’enquête :
La parentalité désigne l’ensemble des façons d’être et de vivre le fait d’être parent. C’est un processus qui conjugue les différentes dimensions de la fonction parentale, matérielle, psychologique, morale, culturelle, sociale. Elle qualifie le lien entre un adulte et un enfant, quelle que soit la structure familiale dans laquelle il s’inscrit, dans le but d’assurer le soin, le développement et l’éducation de l’enfant. Cette relation adulte/enfant suppose un ensemble de fonctions, de droits et d’obligations (morales, matérielles, juridiques, éducatives, culturelles) exercés dans l’intérêt supérieur de l’enfant en vertu d’un lien prévu par le droit (autorité parentale). Elle s’inscrit dans l’environnement social et éducatif où vivent la famille et l’enfant (Conseil National de la parentalité, 2011).
Paradoxalement, en dotant les enfants fréquentant les institutions éducatives des camps de capacités langagières et relationnelles dont sont dépourvus les parents, mon hypothèse de départ fut que l’éducation encourageait dans un premier temps l’inversion des générations et, au-delà, d’une parentalité qui devenait l’apanage des enfants. En revanche, à mesure que l’école suscitait l’intérêt des parents, qu’ils en devenaient à leur tour des usagers et s’appropriaient l’objet, quand bien même ils ne fréquenteraient pas directement les salles de classe, je me suis aperçu que le phénomène s’estompait.
Afin de vérifier cette hypothèse de départ, je me suis rendu entre 2017 et 2019 dans sept camps de Grèce : Skaramangas, Eleonas et Ritsona sur le continent ; Vial, Kara Tepe, Moria et Vathy sur les îles de la mer Égée. J’y ai réalisé dix-sept observations de classe et mené cinquante-six entretiens semi-directifs avec toutes les parties prenantes de l’éducation, qu’elle soit formelle (dispensée par l’État) ou non-formelle (dispensée par des tiers) : usagers des institutions éducatives, gestionnaires ou administrateurs, enseignants, personnalités politiques, fonctionnaires en poste dans différents ministères et représentants d’agences onusiennes. Ma grille d’observation et mon guide d’entretien étaient articulés autour des axes suivants : les migrants, l’éducation, la pédagogie, l’interculturalité, les représentations, les interactions. Les entretiens ont été retranscrits et codés manuellement en vue d’une analyse thématique dans des tableaux reprenant toutes les catégories de questions posées aux enquêtés.
Dans cet article traitant du lien entre l’éducation et la parentalité en contexte de camp de migrants, je tenterai de répondre à la question suivante : Comment les institutions éducatives sises au sein même des camps permettent d’abolir le phénomène d’inversion des générations ? Pour ce faire, je débuterai par un panorama des contextes institutionnels et politiques conduisant à l’émergence d’écoles dans les camps. Par la suite, je présenterai les dynamiques d’inversion des générations avant de détailler les pratiques permettant un rééquilibrage.
2. DU DÉVELOPPEMENT EXPONENTIEL DES DYNAMIQUES D’ENCAMPEMENT À CELUI DES INSTITUTIONS ÉDUCATIVES
Le Régime d’Asile Européen Commun (RAEC) est constitué de cinq textes que les pays membres de l’Union européenne (UE) ont eu l’injonction de transposer dans leur droit national avant juillet 2015. Parmi ces textes, il sera surtout fait appel au règlement Dublin car il s’agit d’un pilier de l’approche hotspots dont je vais présenter la construction. Parallèlement aux dernières transpositions du RAEC dans les systèmes juridiques nationaux des pays membres de l’UE, le 15 mai 2015, la Commission européenne à travers son président Jean Claude Juncker a présenté un agenda en matière de migrations pour la période 2015 – 2020 (European parliament et al., 2015) en soulignant la nécessité d’avoir une « approche globale » des migrations.
Cet agenda s’inscrit dans la lignée des travaux de Bimal Ghosh sur le « migration management » (Ghosh, 2000) que l’on peut traduire par gestion migratoire. La prémisse de ce cadre est que, bien gérée, la migration peut être positive pour les pays d’origine, les pays de destination et les migrants en accord avec le slogan « win-win-win » (Geiger et Pécoud, 2010 ; Pécoud, 2015). En pratique, la gestion migratoire met en place trois séries de mesures (Geiger et Pécoud, ibid.) :
Un contrôle plus efficace des frontières, y compris des mesures de « déterritorialisation » visant à intercepter les migrants avant leur accès à l’Union européenne ; la signature d’accords avec les pays tiers et les pays de transit afin de les amener à mettre un terme aux migrations irrégulières et de permettre le renvoi des migrants interceptés dans ces pays ; l’élaboration de programmes de co-développement en partenariat avec les pays de transit et/ou d’émigration.
2.1. Regards sur la multiplication des camps aux portes de l’Europe
Le déploiement d’une approche hotspots dans les États de l’UE que la Commission européenne considère confrontés à des « pressions migratoires démesurées » est inscrit dans l’agenda. Ce sont les zones situées aux frontières de l’UE qui sont concernées, particulièrement l’Italie et la Grèce, qui ont des positions géostratégiques en tant que points d’entrée. Dès le 15 juillet 2015, les États membres de l’UE ont reçu une feuille de route (Avramopoulos, 2015) concernant sa mise en œuvre.
L’approche hotspots est censée proposer un cadre opérationnel impliquant les agences dédiées de l’UE pour assister les pays dits « en première ligne » (Rodier, 2017). En Grèce, les hotspots sont localisés sur les îles de Lesbos, Samos, Chios, Léros et Kos. Cette approche est articulée autour de l’enregistrement, l’identification, la prise d’empreintes digitales et le recueil de témoignages des demandeurs d’asile ainsi que de la gestion des opérations de retour. L’objectif est de déterminer qui est éligible à la protection que garantit l’asile. Une fois identifiés, les candidats potentiels doivent déposer leur demande de protection en Grèce si l’on s’en tient au règlement de Dublin.
Il s’agit en effet de l’État qui a joué un rôle prépondérant dans l’entrée des migrants au sein de l’Union et c’est sur son territoire qu’ils ont été identifiés. Quant aux candidats jugés illégitimes, c’est désormais l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes, créée pour remplacer l’Agence Frontex, qui coordonne leur retour. Cette nouvelle agence a été présentée via un communiqué de presse du 6 octobre 2016 (Commission européenne, 2016). Elle est une concrétisation du Règlement (UE) 2016/1624 (Parlement européen et Conseil de l’Union européenne, 2016) visant un renforcement de la sécurité aux frontières. Précédemment, Frontex ne disposait pas de son propre personnel et ne pouvait engager d’opérations de retour sans être sollicitée par un État membre. La nouvelle agence gagne en autonomie et peut décider unilatéralement des opérations de retour.
Les nouvelles compétences de cette agence, élément clé de l’approche hotspots, sont à mettre en parallèle de la Déclaration UE-Turquie du 18 mars 2016. Depuis cette date, tous les nouveaux migrants en situation irrégulière qui partent de la Turquie pour gagner les îles grecques peuvent être renvoyés en Turquie. En contrepartie, selon le principe du « un pour un », pour chaque Syrien arrivé illégalement et renvoyé en Turquie depuis les îles grecques, un Syrien sera réinstallé de la Turquie vers l’UE. Dès lors, l’Agence européenne de garde-frontières et de garde-côtes renvoie les migrants en Turquie selon son gré, quand bien même la Grèce ne cautionnerait pas cette pratique, ce qui était le cas jusqu’en 2019 et aux défaites électorales subies par la formation politique Syriza.
En avril 2017, alors que je préparais ma première enquête exploratoire en Grèce et dans les Balkans, un texte m’a particulièrement interpellé. La Cour des comptes européenne a publié un rapport spécial rendant compte d’un audit réalisé dans les hotspots (Wessberg et Szabolcs, 2017). Dès les chapitres introductifs, les structures d’accueil sont qualifiées de « toujours pas bien adaptées » d’autant plus que certaines ne sont toujours pas opérationnelles, tandis que d’autres ont eu plusieurs mois de retard dans leur mise en service. Officiellement, l’approche hotspots est présentée comme celle qui doit permettre aux migrants de déposer une demande d’asile, demander une relocalisation ou faciliter un retour dans le pays d’origine. Officieusement, si elle a permis l’identification et l’enregistrement de la plupart des migrants arrivés, les procédures sont si lentes que c’est elle qui est à l’origine des « goulets d’étranglement » qui se dessinent et qui contribuent à la prolifération du nombre de camps. Par exemple, d’après ce rapport spécial, les 350 000 arrivées par la mer en 2016 en Grèce sont plus nombreuses que les départs. Entre mars 2016 et décembre 2016 il y a eu 748 renvois vers la Turquie pour 17 000 arrivées dans les hotspots des îles grecques.
2.2. Un déni d’inclusion qui catalyse le développement d’écoles dans les camps
En Grèce, j’ai rencontré deux types de camps : les Reception and Accomodation Centers (RAC) sur le continent comme le camp de Skaramangas que j’ai pu pénétrer dès mon enquête de 2017 et les Reception and Identification Centers (RIC) dans les hotspots. Ces derniers sont dédiés à l’identification, l’enregistrement, la prise d’empreintes digitales et le recueil des témoignages des migrants pour déterminer s’ils sont éligibles à l’asile. Ce n’est donc qu’à l’issue de ce processus qu’ils peuvent désormais envisager de rejoindre un RAC sur le continent où ils attendront que leur demande d’asile soit traitée. Tous les migrants que j’ai rencontrés dans les RAC sont donc déjà passés par un RIC.
Il existe un programme intitulé Reception Facilities for Refugee Education (RFRE ou DYEP si l’on utilise l’acronyme grec qui est le plus souvent employé, même par les anglophones ou francophones) qui poursuit un objectif transitionnel entre la situation d’urgence et l’installation durable en permettant aux enfants des camps de fréquenter une école publiques quelques heures par jour, lorsque les élèves Grecs sont partis. Dans une logique de construction de dynamiques interculturelles, les élèves Grecs et ceux issus des camps se croisent sur certaines plages horaires, prenant une récréation ensemble et participant à des activités ponctuelles. Cependant, le système éducatif grec encourage une forme de déni d’inclusion des enfants déplacés dans le système scolaire formel, notamment dans les hotspots, tel que décrit par la coordinatrice de l’UNICEF que j’ai rencontrée lors de chacun de mes terrains :
Le DYEP n’est en vigueur que sur le continent même si en septembre 2017 le gouvernement a annoncé une généralisation du dispositif. Le programme DYEP ne concernant que les enfants vivant dans des RAC et les camps situés dans les îles n’étant pas des RAC mais des RIC, les enfants des camps n’y ont pas accès.
Les 700 Zones of Education of Priorities (ZEP) dont l’existence précédait les flux migratoires de ces dernières années sont quant à elles indifféremment disséminées sur le continent et les îles. Le cadre du dispositif a évolué et les écoles en ZEP qui accueillent entre 9 et 20 enfants déplacés peuvent ouvrir une classe d’accueil spécifique. Les élèves sont en permanence inclus à une classe ordinaire et bénéficient d’un soutien particulier en petits groupes de besoin en Grec, Anglais, mathématiques, sciences. Néanmoins, poursuivant son objectif de déni, la modification du statut des ZEP n’a toujours pas, selon la coordinatrice de l’UNICEF, permis de scolariser les enfants vivant dans les camps situés sur les îles :
Les ZEP n’étant accessibles qu’aux enfants vivant en dehors des camps et les migrants des îles ne vivant que dans des camps il n’y a pas de possibilité pour eux d’inscrire les enfants dans un système d’éducation formel.
La conception que le gouvernement se fait de l’éducation est révélatrice d’une gestion des migrations à deux vitesses. Une politique volontariste est menée sur le continent où le souhait est d’intégrer des migrants qui vont potentiellement rester sur le territoire tandis qu’une politique restrictive est menée sur les îles pour ne pas donner envie aux migrants de rester et pour inhiber le flux d’informations positives qui pourrait sortir de Grèce via les réseaux sociaux, donnant envie à de nouveaux migrants de tenter la traversée à partir de la Turquie. Le gouvernement, qu’il s’agisse de celui de Syriza qui était à la tête de la Grèce lors de mes premières visites ou de celui de Nouvelle Démocratie élu en 2019, justifie cette politique en argumentant que les migrants présents sur le continent veulent rester ou vont rester en raison du règlement de Dublin. Sur les îles, depuis l’accord UE-Turquie, ils ne sont en Grèce que de façon temporaire puisqu’une fois enregistrés ils vont retourner en Turquie, faire appel à la relocalisation ou demander l’asile en Grèce auquel cas ils pourront, sous certaines conditions, gagner à leur tour le continent.
Le déni d’inclusion opposé aux enfants déplacés dont la concrétisation est leur éloignement des possibilités de rejoindre le secteur public de l’éducation catalyse la multiplication des écoles au sein des camps. Paradoxalement, la période que les enfants passent au cœur de ces institutions éducatives peut devenir une étape positive de leur parcours migratoire car les enseignants, généralement formés par l’UNICEF, ont une conscience fine de la construction de l’interculturalité et de la prise en compte du trauma. Ces deux dimensions sont en lien avec la question centrale de la parentalité que je vais mettre en débat.
3. L’INVERSION DES GÉNÉRATIONS DANS LES CAMPS DE RÉFUGIÉS DE GRÈCE
Dès mon premier séjour en Grèce, je me suis rapproché de l’Education Sector Working Group (ESWG). Ce groupe de travail regroupe des associations locales et des ONG internationales, des représentants du secteur public Grec ou encore des agences onusiennes. Dans le cadre de l’ESWG, le ministère de l’Éducation se consacre particulièrement à l’organisation du programme DYEP précité. J’ai pu assister à la première « révolution » de l’ESWG que fut le départ de l’ONG Save the Children qui partageait le leadership de l’institution avec l’UNICEF, cette agence étant désormais seule aux commandes dès fin 2017 ou début 2018. C’est le moment où l’UNICEF commence à s’appuyer sur des implementing partners pour maintenir une offre en termes d’éducation non-formelle dans les camps et contrecarrer le déni d’inclusion présenté précédemment. L’ONG Metadrasi est le partenaire de l’UNICEF sur les îles. Sur le continent, son équivalent est l’ONG Elix. Les deux sont des ONG grecques. Lors de mon dernier séjour de terrain en 2019, l’ONG Metadrasi a perdu nombre de ses prérogatives au profit de l’ONG Solidarity Now qui est devenu l’implementing partner principal de l’UNICEF pour les activités d’éducation non-formelle dans tous les camps de Grèce.
3.1. Une inversion initialement entretenue par les complexes éducatifs des camps
Plusieurs entretiens, notamment menés dans le camp de Ritsona en Grèce continentale, en 2019, semblent décrire des comportements d’enfants dépassant ce que la conception traditionnelle de la famille attend d’eux. Les entretiens menés avec l’administratrice de la kindergarten du camp et la coordinatrice de Solidarity Now que j’ai rencontrées autour de la même table permettent d’illustrer cet état de fait alors que nous évoquons le climat de violence qui se développe dans un camp qu’elles qualifiaient jusqu’alors de « paisible » :
Nous sommes fières du comportement de certains enfants qui fréquentent les cours donnés dans le camp car ils sont très matures, mais peut-être trop matures car ce sont leurs parents qui devraient se comporter de la sorte.
Dans ce contexte, elles me présentent les enfants comme des régulateurs de violence, les enfants prennent en charge un aspect « moral » et « psychologique » de la définition de la parentalité présentée plus en amont. En effet, plusieurs fois, alors que le ton monte entre adultes, des enfants d’une dizaine d’années se sont posés en tant que médiateurs en mettant les adultes face à l’incohérence de leur comportement ou en s’interposant avant qu’une rixe n’éclate. Elles y voient tout autant un effet positif du travail effectué en classe, notamment autour des aspects de médiation interculturelle, qu’un inversement de parentalité et des rôles entre enfants et adultes : « Ce sont les enfants qui devraient se disputer en jouant et les adultes qui les ramènent à la raison, non le contraire. » Pour d’autres acteurs de terrain issus des implementing partners de l’UNICEF, rencontrés dans d’autres camps, les enfants remplissent souvent un rôle que les parents ont délaissé par la force des choses, les enfants prenant un charge une dimension « sociale » de la parentalité. Deux cas de figures me sont exposés par la coordinatrice de l’ONG Elix dans le camp de Skaramangas :
Premièrement, les parents qui mènent des démarches administratives sont entièrement absorbés par cette tâche, que ce soit physiquement ou moralement. Deuxièmement, beaucoup d’adultes vivant dans les camps subissent de graves épisodes dépressifs, par conséquent leur fonction au sein de la famille est plus délicate à assumer.
Sur ces aspects, il convient de faire la différence entre les Reception and Accomodation Centers (RAC) situés sur le continent et les Reception and Identification Centers (RIC) situés sur les îles. Dans les RAC de Skaramangas, Eleonas et Ritsona que j’ai traversés, l’habitat est constitué de containers avec des panneaux solaires, ce qui permet d’avoir de l’eau chaude et de l’électricité. Les enfants peuvent assumer des tâches du spectre « matériel » de la parentalité comme le ravitaillement, notamment dans le camp lorsqu’il y existe une activité économique, même si les parents gardent traditionnellement un droit de regard sur cette dimension. En revanche, les containers étant régulièrement entretenus et réparés par l’administration du camp, les enfants assurent toutes les tâches domestiques dans cet espace de transit relativement digne, notamment le ménage. Enfin, les grands frères et grandes sœurs se voient confier la charge de s’occuper des plus jeunes. Ce raisonnement est extrapolable au RAC de Kara Tepe, sur l’île de Lesbos, qui est l’un des seuls RAC situés en mer Égée tandis que tous les autres camps sont des RIC. Ce camp n’avait jamais connu de surpopulation jusqu’à mon passage et était présenté comme un modèle au même titre que celui d’Eleonas dans les rapports du comité scientifique ayant élaboré le programme DYEP.
Dans les RIC, comme celui de Vial (île de Chios) que j’ai pu pénétrer mais aussi ceux de Moria (île de Lesbos) et Vathy (île de Samos) dont j’ai pu m’approcher et prendre la mesure des expansions informelles qui prennent la forme de tentes, il convient de différencier l’intérieur et les extérieurs proches. Dans les parties formelles du camp, composées de containers surpeuplés mais disposant eux aussi de facilités sommaires permettant un accès relatif à l’hygiène, le rôle des enfants ressemble à celui des RAC, même si, selon une enseignante de l’ONG Metadrasi rencontrée sur l’île de Chios, ils sont contraints d’assumer des caractères « psychologiques » de la parentalité pour la raison suivante : « La détresse morale et la dépression y tiennent une place plus importante que sur le continent. » En revanche, dans les expansions informelles, les enfants assurent avant tout les tâches « matérielles » de ravitaillement en nourriture car, toujours selon la même enquêtée :
La nourriture est la clé des dynamiques de survie dans lesquelles s’inscrit le quotidien de ces familles. Dans les diverses guérites du camp ou en ville quand celle-ci est accessible, les enfants sont en charge de faire les courses. Dans la mesure où les habitations ne sont que sommaires, ouvertes aux quatre vents et sises dans des artères où la saleté et les odeurs sont difficilement supportables, les tâches ménagères ne semblent plus être une priorité pour les familles et les représentations de ce qu’est l’hygiène corporelle sont bouleversées.
Dans ce cadre, les enfants qui fréquentent une école, qu’il s’agisse d’une école formelle dans le cadre d’un programme transitoire comme le DYEP ou une école non-formelle dans un camp, développent une première série d’habiletés en se familiarisant avec l’environnement, ce que certains parents ne sont pas en mesure de faire, acquérant des compétences « sociales » de parentalité dont sont dépourvus les parents. Par conséquent, la fréquentation d’une école exacerbe dans un premier temps l’inversion des générations telles que décrite en introduction. Cette exacerbation semble structurelle dans la mesure où les enfants sont les premiers à acquérir les codes de la société d’accueil, à intérioriser sa norme pour ce qui aboutit à une véritable parentification. Ce n’est que lorsque la norme atteindra les parents qu’il sera possible de contrecarrer la situation et déparentifier les enfants.
3.2. L’approche de la parentalité à travers les institutions éducatives
L’UNICEF, dont j’ai documenté les activités de 2017 à 2019 et qui coordonne l’intervention éducative auprès des enfants déplacés sur tout le territoire de la Grèce, a élaboré sa propre vision de la place des parents. Lors de mes enquêtes de 2018 et 2019, la majorité des migrants présents en Grèce continentale semblait avoir accepté le fait que la Grèce soit une destination finale, ce qui a permis à l’UNICEF d’affiner sa conception de la parentalité pour devenir un axe fort de la stratégie d’éducation des enfants déplacés.
Les Refugee Education Coordinators (REC), représentants et employés du ministère de l’Éducation sont les garants du DYEP déjà présentés et les intermédiaires de l’UNICEF dans les camps. Ils ont été incités à travailler au plus près des familles pour les convaincre de l’essentialité du suivi d’un parcours scolaire, non-formel dans le camp, puis formel en dehors. En cas d’absence des enfants, il n’était pas rare d’observer que les REC aillent eux-mêmes les réveiller, discuter avec les familles afin d’identifier les raisons d’absences prolongées ou de comportements des enfants jugés étranges par certains enseignants. Pour l’UNICEF, cette coopération est primordiale mais elle ne peut s’exercer que dans le cadre d’un partenariat entre le formel et le non-formel au sein duquel l’État est partie prenante. Les écoles accueillant un dispositif DYEP faisaient en effet remonter toutes les absences aux REC, ce qui n’était initialement pas le cas des ONG menant à bien des objectifs propres, dans un climat de concurrence déstabilisateur.
3.2.1. Réflexions sur la parentalité en Grèce continentale
Dans les camps que j’ai traversés, certaines ONG s’autoproclamaient être des écoles quand bien même elles ne proposaient que des activités récréationnelles, expliquant aux parents qu’il valait mieux avoir l’école à côté des habitations que prendre le risque d’envoyer les enfants en ville. La réponse logistique de l’UNICEF et de l’Organisation internationale pour les migrations (OIM) fut de mettre en place un service de bus venant chercher les enfants directement dans le camp pour les conduire dans les écoles formelles où se déroulait le DYEP. Face à des ONG se sentant dépossédées de leurs prérogatives, l’UNICEF et l’OIM ont dû leur faire comprendre dans le cadre de discussions de longue haleine que leur travail était complémentaire et nécessaire. En effet, l’UNICEF et sa coordinatrice en étaient arrivés aux conclusions suivantes :
Dans le contexte des camps de Grèce, l’école dépasse le cadre strictement éducatif pour devenir un outil de plaidoyer auprès des parents quant à toutes les questions liées à la vie de camp, à l’hygiène, aux services à disposition ou encore aux problématiques administratives.
Il s’est agi d’un travail de fond dont l’équilibre était précaire. L’UNICEF savait que son objectif de promouvoir le DYEP, malgré un contexte politique parfois tendu, présentait à la fois les avantages et les inconvénients du secteur formel. Les enseignants issus du secteur public n’avaient pas la volonté d’impliquer les migrants dans l’éducation. Cela s’est traduit par une gestion de la parentalité empreinte de formalisme, les parents des enfants déplacés devant demander un rendez-vous pour visiter l’école ou rencontrer quelqu’un qui s’occupe de leurs enfants. Selon les REC du camp de Skaramangas :
Les pratiques doivent évoluer et la volonté des acteurs de l’éducation non-formelle n’est a priori pas suffisante si l’éducation formelle n’entretient pas la dynamique.
Ils ont en effet tenté d’organiser une réunion parents-professeurs dans le camp, mais en raison d’un manque d’interprètes et du peu de participants, cette expérience fut considérée par les organisateurs comme un quasi-échec. Pour y pallier, les REC ont également tenté d’emmener les parents visiter les écoles publiques et rencontrer les parents grecs. Enfin, à Eleonas, une fête a été organisée dans le camp avec les enseignants des DYEP, ainsi que les enfants grecs de ces écoles accompagnés de leurs parents. Cet évènement festif ayant mobilisé davantage d’adultes, ce type de manifestations est devenu une piste privilégiée pour les prochaines années scolaires.
C’est pour impliquer les migrants le plus tôt possible dans les dynamiques éducatives au sens large que le ministère de l’Éducation s’est investi dans l’implantation de kindergartens au sein des camps. Les enfants concernés sont si jeunes que les parents sont obligés de venir, les enfants ne pouvant faire le trajet entre le container et l’école seuls. Il s’agit d’un moyen détourné de les atteindre et il est recommandé d’organiser un espace pour que les parents puissent discuter et prendre le thé. Les REC encouragent l’implication des parents dans l’éducation des enfants tout en faisant le constat lucide que cette dynamique n’est pas (encore) ancrée dans la vie du camp.
3.2.2. Réflexions sur la parentalité sur les îles de la mer Égée
Sur les îles de la mer Égée, situées face à la Turquie, le premier obstacle à l’implantation du DYEP fut la négociation avec les locaux. En effet, les parents refusaient d’envoyer leurs enfants à l’école si des migrants y étaient accueillis, exerçant des pressions sur les directeurs d’écoles. De fait, le DYEP n’a par exemple été développé sur l’île de Samos qu’en avril 2018 tandis que les enfants devaient rejoindre l’école à pied car le maire avait tout mis en œuvre pour que ni l’OIM, ni les transporteurs locaux ne puissent assurer le transport scolaire.
À l’été 2019, le DYEP est mis en place dans deux écoles de l’île, l’une est située très proche du camp, l’autre est plus éloignée. Dans l’école la plus éloignée, il y eut selon l’une des REC du camp de Vathy, sur l’île de Samos, des protestations des parents Grecs quant à l’inclusion des migrants : « Ils ont fait courir le bruit selon lequel les migrants contaminer leurs enfants en leur transmettant des maladies ». Le directeur s’est alors empêtré dans ses négociations avec les parents, il a organisé deux récréations différentes pour les Grecs et les migrants qui ne se croisaient jamais alors que le but du DYEP est d’opérer une transition. Pour lui, la transition passait par la séparation, pour satisfaire les pressions des parents et ne pas les transformer en adversaires. Afin de désamorcer les tensions, le vice-président du Hellenic Center for Disease Control & Prevention (KEELPNO[1]) s’est rendu en personne, à la demande du ministère de l’Éducation, dans cette école et a organisé des conférences en ville, démontrant scientifiquement qu’il n’y avait pas de risque sanitaire. Par exemple, malgré plusieurs cas de tuberculose dans le camp, il a convié un pédiatre pour expliquer que les enfants ne pouvaient pas transmettre cette maladie. Une association de défense des droits de l’enfant est également intervenue, elle s’est rendue dans les écoles formelles pour réaliser des exposés avec les enfants, ainsi que des sensibilisations. Le directeur n’a finalement eu d’autre choix que celui d’accepter de mêler les enfants lors des récréations, la situation s’est apaisée et les interactions avec les parents grecs ont évolué.
Ces représentations sociales faisant le lien entre migration et maladie ont surtout été étudiées par les chercheurs à partir de cas de malades souffrant du Sida (Fassin, 2001 ; Fassin et al., 2001) dont les étrangers sont les coupables idéaux puisque la maladie est présentée comme un « péril venu d’ailleurs ». L’intérêt des travaux de Didier Fassin réside aussi dans le fait qu’il démontre que la maladie n’est pas la source de la représentation stigmatisante. Elle vient plutôt combler un « espace de disqualification préexistant » (Fassin, ibid.) particulièrement adapté aux représentations sociales en vigueur en Grèce. Toujours selon la REC du camp de Vathy, cet argument médical était avant tout politique, entretenu par le maire et ne devait pas devenir une excuse pour aller à l’encontre de l’obligation de scolariser tous les enfants :
Il existe un discours selon lequel les îles de la mer Égée seraient envahies et qu’il faudrait s’occuper des Grecs avant de s’occuper des étrangers. Mais il y aussi la loi qui dit que tous les enfants doivent aller à l’école.
Dans la seconde école mettant en œuvre le DYEP sur l’île de Samos, plus proche du camp, le directeur n’a pas laissé les discours stigmatisants se développer. Il s’est montré strict face aux parents qui commençaient à protester, rappelant que la loi grecque exigeait que tous les enfants aillent à l’école. Dès les premiers échanges entre enfants, les écoliers Grecs ont selon la REC de Vathy semblé majoritairement heureux de découvrir de nouveau camarades, différents de ce qu’ils connaissent et ils ont porté un discours positif dans leurs foyers, agissant en tant que prescripteurs et convaincant leurs parents. Cette école n’est qu’à quinze minutes de marche, mais le trajet reste dangereux pour des enfants d’autant plus qu’il y a une route nationale à traverser. Les parents se sont donc relayés pour emmener des groupes d’enfants à l’école, d’abord par obligation, puis par affinités qui dépassaient les appartenances communautaires, ce qui restait difficilement concevable dans le cadre d’autres activités. Cela contribue enfin à responsabiliser les parents, ce qui rejaillit sur l’image que ces derniers ont d’eux-mêmes. Ils reprennent un véritable rôle dans la famille, conduisent leurs enfants à l’école comme s’ils vivaient en ville, comme ce qui est attendu d’eux dans la société occidentale qu’ils sont en train de rejoindre. Quant à la parentalité chez les migrants, selon la coordinatrice de la kindergarten du camp de Vathy, le dispositif DYEP fut un catalyseur de la redécouverte du lien social :
Les parents ont développé une conscience positive de l’école et ont appris à apprécier les enseignants. Plusieurs ont avancé être touchés par le fait que des Grecs prennent soin de leurs enfants alors que ce sont des étrangers.
Ce discours s’est traduit en actes car l’apparence des enfants a changé, ils venaient désormais peignés, habillés proprement et n’étaient que rarement absents. Par conséquent, certains parents ont même demandé à ce que la kindergarten du camp reste ouverte plus longtemps, pour que les enfants puissent faire des siestes car dans les containers ils n’y parvenaient pas et faisaient des cauchemars. Au-delà, des enfants qui n’avaient plus l’âge de fréquenter une kindergarten sont venus y prendre du repos. Dans le contexte hostile du camp de Vathy, la scolarisation peut enfin représenter une forme de soulagement pour les parents qui savent que leurs enfants sont en sécurité tandis qu’eux-mêmes peuvent vaquer à des occupations personnelles. L’approche restrictive menée par la municipalité n’a pas inhibé la prise d’importance de la dimension éducative dans la vie des migrants et a débouché sur des solidarités nouvelles entre parents du camp.
4. LE GESTE PROFESSIONNEL DE L’ENSEIGNANT AU SERVICE DE L’ATTRACTION ET DE LA RÉTENTION DES PARENTS
J’ai précédemment évoqué pourquoi les acteurs de l’éducation non-formelle dans les camps de Grèce se sont lancés dans l’élaboration d’une stratégie de gestion de la parentalité. La modélisation que certains ont fait de cet objectif prouve à quel point cette dimension est devenue une priorité. La curiosité des parents quant à l’objet scolaire semble, selon mes enquêtes, liée au curriculum proposé aux enfants, qui offre une transposition immédiate dans la vie quotidienne à travers le développement des capacités langagière, relationnelles ou spatiales. Avec un curriculum dédié à l’urgence et à la survie dont les enfants tirent un avantage, les parents se rendent rapidement compte qu’ils ont quelque chose à gagner lorsqu’ils envoient leurs enfants à l’école, mais aussi lorsqu’ils y restent eux-mêmes pour acquérir des compétences leur permettant d’améliorer leur condition. À la suite de cette curiosité, l’enjeu devient pour les enseignants de transformer les parents en destinataires de l’école puis en prescripteurs. Je présenterai donc dans cette troisième partie comment les implementing partners de l’UNICEF ont décliné les positions de cette agence quant à la parentalité, avec des succès variables mais de véritables pistes de réflexion à envisager.
4.1. La déclinaison des positions de l’UNICEF selon l’ONG Elix
Pour la coordinatrice de l’ONG Elix rencontrée dans le camp d’Eleonas, l’école contribue à l’intégration des enfants mais aussi de leurs parents dans la société grecque et ces derniers sont à considérer comme « partenaires » tout autant que comme « cibles » des programmes :
Ils sont « partenaires » parce que ce sont eux qui savent comment se comporte l’enfant en dehors de l’école. Ils sont également « cibles » car il n’y a pas que les enfants qui nécessitent un soutien et les parents ont besoin d’acquérir des compétences langagières, de passer du temps dans un lieu où ils se sentent bien et en sécurité.
Dans un premier temps, les enfants et leurs parents sont mis sur un pied d’égalité lorsque les seconds fréquentent des complexes éducatifs dont les premiers sont les destinataires initiaux. En effet, les enfants sont la priorité des ONG dès leur arrivée. Ils disposent immédiatement de cours d’Anglais et de Grec. Par conséquent, ce sont eux qui deviennent compétents pour faire les courses et assumer les aspects « matériels » de la parentalité. Ils deviennent les interlocuteurs des autorités et servent de médiateurs à leurs parents dans le cadre d’une composante « sociale » dévolue à leurs parents voire « culturelle » dans les pays occidentaux. À mesure qu’ils deviennent incontournables, les rôles au sein de la famille s’inversent. Dans les écoles des camps, il devient alors difficile de donner des cours aux adultes en raison des représentations qu’ils ont d’eux-mêmes, ceux-ci se sentant fréquemment ravalés au rang d’enfants. Toujours selon la coordinatrice de l’ONG Elix pour le camp d’Eleonas, les ONG ont conscience que cela représente un inconvénient majeur :
Le sentiment de dévalorisation est décuplé dans les camps d’autant plus qu’il se conjugue à la question du trauma et à une bureaucratisation du quotidien qui crée un sentiment de culpabilité. Dans les premiers temps de l’implantation des écoles, que ce soit à Skaramangas ou à Eleonas, on avait l’impression que les parents fuyaient face à nous.
C’est à l’été 2019, alors que nous discutions avec l’ancienne coordinatrice de l’ONG Elix pour le camp le Skaramangas, qui se consacre désormais à un projet d’inclusion urbaine mené par la même ONG, que j’ai perçu à quel point la question de la parentalité était en voie de formalisation chez Elix :
Ce projet fait suite au constat que les camps sont un lieu de marginalisation, tandis qu’en ville les parents prennent conscience que la norme produite par l’école les aide dans le cadre de la vie quotidienne, encore faut-il parvenir à sortir les familles des camps.
Désormais coordinatrice de ce nouveau projet, elle semble regretter, maintenant qu’elle en a compris les enjeux, de ne pas avoir assez mis l’accent sur la parentalité lorsqu’elle travaillait en contexte de camp :
La parentalité devrait être un axe majeur des programmes car la proximité spatiale avec les parents est immédiate. Il suffit d’aller frapper à la porte du container pour les atteindre.
De surcroît, elle a observé que dans les camps, les parents passaient beaucoup de temps dans les locaux des écoles, ce qui est moins vrai en ville. Dans son discours, je ressens presque une volonté de rattraper le temps perdu. Le programme qu’elle administre est ouvert jusqu’à 20 heures et tous les enfants peuvent venir jouer, pas seulement les migrants, la seule condition est de venir avec ses parents. Un gardien est présent uniquement pour veiller au bon déroulement des activités, mais les parents sont sensés surveiller leurs enfants. Inspirée par les manifestations festives tentées à Eleonas, l’ONG Elix dont elle est issue a également planifié plusieurs moments collectifs entre habitants du quartier au sein de l’école.
Dans mes observations, j’ai ressenti l’influence de l’UNICEF quant à la parentalité dans les activités menées par l’ONG Elix mais la concrétisation d’une stratégie d’attraction des parents a tardé à se concrétiser. Il a fallu attendre que le projet d’inclusion urbaine se dessine pour que cette dimension devienne un objectif plus en amont, directement dans les camps.
4.2. La déclinaison des positions de l’UNICEF selon Metadrasi
L’activité de l’ONG Metadrasi dans les îles envisage les questions de parentalité à travers le spectre langagier. La première fois que j’ai abordé la question de la place des parents dans l’éducation des enfants déplacés avec la coordinatrice nationale de l’ONG, basée au siège situé à Athènes, elle a aussitôt évoqué le rôle des interprètes :
Ils sont considérés comme un support pour les interactions avec les parents ainsi qu’entre l’école et la vie du camp, c’est un point fort de l’éducation non-formelle face à l’éducation formelle.
Dans le camp de Kara Tepe, sur l’île de Lesbos, j’ai pu échanger de façon informelle avec des interprètes au sein du complexe éducatif, ils restaient hors des classes. J’ai observé leur activité dans l’espace dédié aux activités récréationnelles où plusieurs habitants du camp étaient présents, dans la cour pour échanger avec les enfants ou dans les bâtiments administratifs lorsqu’il fallait aider des parents. Ils semblent attentifs à une dimension qui est la création de lien, justifiant le fait que plusieurs ONG que j’ai rencontrées les appellent des « facilitateurs » plutôt que des interprètes tandis que les enfants et les parents les appellent par leur prénom. Les enfants les considèrent tantôt comme des grands frères quand ils sont Grecs, tantôt comme des « oncles » quand ce sont des migrants. Les parents y voient une figure rassurante dans la mesure où ils parlent leur langue mais sont proches d’eux-mêmes puisque certains sont des migrants vivant dans les camps.
Dans le camp de Vial, sur l’île de Chios, des interprètes sont également présents dans le complexe éducatif, mais ils restent dans les espaces collectifs, interviennent lors des récréations et accueillent les enfants au portail de l’entrée, échangeant si besoin avec les parents. La coordinatrice du complexe, issue de l’ONG Metadrasi, détaille à quel point ces interprètes sont importants pour parler aux parents :
Ils ne veulent pas rester sur l’île et peuvent avoir tendance à se désintéresser de l’école. Les interprètes sont donc importants puisque les enseignants ne disposent pas des outils pour argumenter sur ces questions. Ils interviennent aussi auprès des enfants, pour leur remonter le moral, quand il est difficile d’expliquer leur mal-être à un enseignant qui ne parle pas la même langue.
Le complexe éducatif reste ouvert hors temps scolaire, les enfants peuvent y faire de la musique, des jeux de société, discuter. Les parents ont commencé à rejoindre ce lieu qui est devenu un espace de sociabilité, sans que cela ne soit initialement suscité par l’ONG. Les interprètes ont ensuite œuvré à maintenir cet état, tentant de mettre les adultes en situation de communication. L’espace récréatif pour enfants a été ainsi ouvert aux adultes, en proposant du thé et des cercles de paroles régulés par des interprètes, à travers des tables rondes ou des débats. Toujours selon la coordinatrice du complexe administré par Metadrasi dans le camp de Vial, la frontière entre le travail avec les enfants et la gestion de la parentalité est fine puisque le rôle d’un enfant dans le camp n’est pas le même que celui d’un enfant en ville :
Ils sont déjà adultes, s’occupent des plus jeunes frères et sœurs et vont faire les courses. Les parents sont surtout concentrés sur les démarches administratives et ne penser qu’à ça quand ils ne sombrent pas dans la dépression. C’est pourquoi toutes les écoles gérées par Metadrasi organisent depuis 2018 des activités à destination des parents lors de rendez-vous mensuels.
Le thème abordé dans les camps de Kara Tepe et Vial est souvent celui de la sécurité routière, parce qu’il y a eu des accidents devant les camps, impliquant à la fois des adultes et des enfants. D’autres thèmes, comme le viol ou les agressions peuvent également être traités car ils sont en lien avec les problématiques de la vie de camp. Pour la coordinatrice de Metadrasi dans le camp de Kara Tepe, la parentalité est en lien avec l’interculturalité puisque la mobilisation des parents permet la création d’un langage commun au-delà des appartenances communautaires :
Les groupes de discussion ne doivent pas se limiter à l’espace du camp et à un public de réfugiés, les tentatives de rencontres entre parents Grecs et migrants sont devenues un axe prioritaire d’autant plus que sur les îles, les interactions entre les Grecs et les migrants sont plus conflictuelles que sur le continent.
L’objectif de l’ONG Metadrasi vise dès lors à orienter les discussions sur les questions de voisinage et l’école devient un dénominateur commun, permettant un travail en douceur sur la transformation des représentations. Même lorsque les échanges concernent le camp, souvent connoté négativement au sein de la société d’accueil, l’école et l’enfance restent des dimensions qui font consensus et échappent aux critiques tant et si bien que les complexes éducatifs de Metadrasi sont mis à disposition des autres ONG désirant organiser des réunions.
Néanmoins, il n’est pas aisé d’attirer les parents. Dans cette perspective, les arguments sont listés et diffusés par les interprètes, mais aussi par les enfants qui sont un premier degré de prescripteurs auprès des parents. Entre les deux, davantage que les enseignants, c’est le curriculum qui fait office de passerelle selon le coordinateur de l’ESWG sur l’île de Lesbos :
Le curriculum proposé aux enfants doit devenir attractif pour les parents. Si les enfants expliquent à leurs parents qu’ils prennent plaisir à l’école et si les parents observent qu’ils peuvent en tirer un avantage, ils seront plus enclins à se déplacer.
Pour les enseignants de Metadrasi rencontrés dans le camp de Kara Tepe, sur lîle de Lesbos, l’expression utilisée est celle de « faire asseoir les parents » car une fois qu’ils sont assis, la dynamique s’auto-entretient. Les discussions sont par ailleurs toujours suivies d’un moment festif, d’un goûter permettant les échanges informels :
Souvent, lors de ces moments, les craintes s’amenuisent et les parents prennent du plaisir, y compris les parents Grecs. Sur les îles de Lesbos et Chios où les camps sont proches de villes ou villages, l’ONG a sollicité les associations locales de parents d’élèves et a observé qu’une une fois « assises » elles pouvaient devenir des alliées dans le combat face à des municipalités conservatrices.
Les travailleurs de Metadrasi développent un argumentaire pour attirer ces parents potentiellement réfractaires à travers des explications sur le fait que la diaspora grecque soit une réalité ou que de nombreux Grecs aient vécu plusieurs années à l’étranger. La parentalité devient une priorité de l’ONG car elle permet un retour immédiat sur la condition des enfants, ces derniers sont heureux de voir leurs parents passer de bons moments avec les parents des camarades Grecs dans le cadre de groupes de parole ou activités festives.
4.3. La déclinaison des positions de l’UNICEF selon Solidarity Now
Plus récemment que les ONG Elix et Metadrasi, Solidarity Now est devenue implementing partner de l’UNICEF. Les manifestations festives ont été privilégiées quant à la création de liens entre les parents du camp et les parents grecs. Les problèmes de racisme ont, selon la coordinatrice nationale de l’ONG que j’ai rencontrée dans ses bureaux de Thessalonique, existé mais se sont estompés. Il est important de rappeler qu’en tant qu’acteur plus récent, Solidarity Now a bénéficié de l’expertise de l’UNICEF, Elix et Metadrasi construite au cours des années précédentes. De fait, la construction des curricula a été menée directement en lien avec la parentalité tandis que les autres acteurs ont intégré l’importance de cette dimension à mesure que leur compréhension du terrain s’affinait.
Pour ce faire, les travailleurs de Solidarity Now et les REC des camps ont beaucoup travaillé sur la cohésion, notamment à travers les sorties scolaires. Ils ont été les premiers à proposer que les adultes encadrants comprennent à la fois des Grecs et des migrants. Selon la REC de Ritsona, en 2019, les parents étaient de plus en plus enclins à envoyer leurs enfants dans les écoles formelles car ils avaient compris que la Grèce était probablement leur destination finale et que cela leur permettrait d’obtenir un certificat de scolarisation favorisant les démarches administratives. Il s’est agi, selon elle, d’un point d’appui pour développer de nouveaux arguments :
On a utilisé le fait que les adultes aient compris qu’ils allaient rester en Grèce pour aller plus loin, on leur a expliqué qu’en plus, quand les enfants sont à l’école, ils peuvent redevenir un couple et vivre une vie à deux.
Cependant, toujours dans le camp de Ritsona, en Grèce continentale, les intervenants de Solidarity Now ont pointé du doigt le fait que les enfants fréquentant l’école aidaient tellement leurs parents que les rôles s’inversaient, l’enjeu devenant alors d’attirer les parents dans l’enceinte du complexe éducatif :
L’étape la plus longue dans le développement d’une école est, pour Solidarity Now, non pas d’attirer les enfants mais les parents. Ce processus passe par l’image qui leur est renvoyée. L’équipe éducative doit être stable et « irréprochable » pour que tout le monde dans le camp connaisse l’école et parle de l’école.
Dans ce contexte, le rôle des complexes éducatifs non-formels situés dans les camps devenait, au-delà de faire la passerelle entre l’éducation formelle et non-formelle, de mener des stratégies d’attraction des parents pour juguler l’inversion des rôles entre adultes et enfants. Pour les administrateurs du camp, le dialogue avec les adultes est jugé difficile car il y a toujours une forme de méfiance tandis que les REC et les enseignants semblent jouir d’une image positive, facilitant le dialogue avec les familles. Il s’agit d’un atout selon la coordinatrice de Solidarity Now qui évoque plusieurs fois le terme « irréprochable » durant notre entretien. Selon elle, cet aspect irréprochable permet de rayonner auprès d’un public dont elle ignorait l’intérêt pour la dimension éducative :
Il faut aussi être irréprochable face aux autres ONG car elles peuvent être des potentielles prescriptrices des activités de l’école auprès de leur propre réseau. C’est pour cette raison que nous mettons toujours nos locaux à disposition si elles veulent faire des réunions par exemple.
Enfin, il existerait des raisons psychologiques voulant que si l’équipe n’est pas stable, l’état émotionnel des enfants soit mis à mal :
Ils vont s’attacher à des adultes qui leur échapperont au bout de quelques jours, générant une souffrance inutile. C’est pour cette raison que Solidarity Now ne fait pas appel aux bénévoles.
La dynamique de bouche-à-oreille faisant l’apologie de l’école ne va cependant pas de soi et c’est le curriculum qui fait office d’accroche :
Il doit susciter la curiosité des parents à travers son contenu qui, orienté vers les impératifs de survie, les convaincra qu’ils ont quelque chose à gagner en envoyant leur enfant à l’école puis en y venant eux-mêmes. Ensuite, de nombreuses réunions sont organisées à l’école avec les parents, avec les autres adultes, afin de présenter le complexe, mais aussi évoquer d’autres sujets comme l’éducation à la santé par exemple.
Dans un premier temps, les enseignants ont fait remonter à la coordinatrice de Solidarity Now, dans le camp de Ritsona, qu’ils avaient l’impression de perdre du temps avec cette dimension para-éducative de leur travail. Par la suite, ils se sont rendu compte que c’était dans ce cadre qu’ils gagnaient la confiance et le respect des parents, ceux-ci étant reconnaissants que des adultes Grecs prennent à ce point soin de leurs enfants.
Des affinités ont également pu se créer entre parents et enseignants, les premiers questionnant les seconds sur leur propre famille, demandant s’ils avaient des enfants, si ces enfants aimaient l’école. Dans la mesure où les enfants déclarent « aimer » leurs enseignants, les parents ont semble-t-il été amenés à faire de même et ont adopté un comportement protecteur envers le complexe éducatif, se proposant de faire le ménage ou d’aider les enseignants à ranger les classes. Les administrateurs du complexe éducatif et de la kindergarten ont donc mené diverses actions permettant d’encourager ce comportement protecteur, notamment à travers des groupes de parole, des goûters, des échanges formels ou informels propices à déconstruire les représentations de part et d’autre.
5. CONCLUSION : UNE MODIFICATION DE LA STRUCTURE DU CAMP AU-DELA DU RETOUR DE PARENTALITÉ
Cette étude permet d’envisager le fait que la fréquentation d’une école par les parents puisse contrecarrer l’inversion des générations, des rôles entre parents et enfants et de parentalité pour ce qui est un invariant du contexte de camp. L’acquisition de compétences, notamment langagières, permet aux parents de reprendre une place centrale au sein de la famille à mesure qu’ils redeviennent l’interface entre le camp et la société d’accueil, sans avoir besoin de solliciter les enfants en tant qu’intermédiaires. A mesure que les parents redeviennent capables de se déplacer sans les enfants, de communiquer avec l’administration du camp et les services de l’asile, ils s’émancipent de l’étiquette dont ils s’étaient vus affublés par la population hôte à travers des discours empreints de racisme ou stéréotypés. Le visage du camp se trouve alors bouleversé puisque ses usagers sont capables de s’affranchir d’une véritable pression que le camp exerçait sur eux, au point d’induire tous leurs comportements. La coordinatrice de l’ONG Elix dans le camp de Skaramangas a particulièrement bien identifié la chronologie menant à cette propagation :
D’abord, le complexe éducatif est malmené, subit des malveillances, des vols. Puis, à mesure que les enfants se l’approprient les parents viennent profiter du curriculum et des activités qui se construisent pour eux. Enfin, ils vont communiquer sur les questions de bien-être à l’échelle du camp et le complexe éducatif sera identifié comme un espace de sécurité émotionnelle pour tout le collectif, contribuant à la création de nouvelles identités et d’un sentiment d’appartenance.
Dès lors, comme cela l’a été décrit quant au camp de Ritsona, tous les acteurs du camp, publics, parapublics ou humanitaires vont pouvoir solliciter cet espace protégé dans le cadre de leur activité, ce qui lui confère une place centrale dans le jeu interactionnel du camp. Les implementing partners de l’UNICEF se sont tous questionnés sur ces interactions inattendues, tout en arrivant à la conclusion que seule une école soit capable de les susciter. Il est intéressant de voir à quels points leurs discours se recoupent. Ils considèrent en effet que les contacts sont plus faciles à établir pour les enseignants que pour tous les autres acteurs du camp dans la mesure où leur fonction est identifiée comme celle de faire du bien, faire du bien aux enfants, au-delà-de la fonction primaire qui est celle de les doter de compétences utilisables.
Dans le camp de Ritsona, j’ai échangé longuement avec la coordinatrice de Solidarity Now sur l’image positive dont jouissent les enseignants dans le camp. Elle illustrait alors son propos par une comparaison avec la situation d’autres travailleurs du camp :
Même les travailleurs sociaux ne peuvent pas être aussi idéalisés que les enseignants puisqu’ils vont avoir la charge d’annoncer aux familles que l’asile a été refusé, pas plus que les employés des agences de l’ONU qui vont expliquer qu’ils ne répareront les containers que d’ici plusieurs jours ou semaines, même s’il n’y a plus d’eau chaude.
Enfin, le mimétisme d’enfants qui se battent quand leurs parents se battent a déjà été évoqué, mais ce mimétisme se vérifie aussi en inversant les rôles. Si les enfants apprécient leurs enseignants, les parents font de même et l’école prend une place centrale dans le jeu d’interactions d’un camp dont le visage se transforme à mesure que les parents reprennent le contrôle de leur vie quotidienne.
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[1] https://integrateja.eu/content/hellenic-center-disease-control-prevention-keelpno ; Consulté le 12 mai 2022